LE JOURNAL :

 

A.H.M.E.

LE CRI DU HARTANI N° 6 (janvier 2003)

 

 "Le Cri du Hartani".

 

Le "Cri du Hartani" est le bulletin de l'A.H.M.E. (Association des Haratine de Mauritanie en Europe) 3, allée Fernand Lindet - 93390 Clichy-sous-Bois. L'A.H.M.E. a été créée le 13 juillet 2001 et déclarée au Journal Officiel Français n°32 du 11 août 2001 sous le n° 2136. L'A.H.M.E. peut être consultée sur Internet : www.journal-officiel.gouv.fr.

Editorial :

Dans ce numéro 6 du " Cri du Hartani ", je vous livre deux articles :

     

  1. La traduction d’un article anglais du journal sud-africain " THE CITIZEN " du 16 février 2003 relatif à une conférence concernant l’esclavage dans le monde arabe ;
  2.  

  3. L’historique d’un détournement de deniers publics fait par deux tribus, Idaouali et Smassid.

 

M. Mohamed Yahya Ould CIRE

Président de AHME

 

_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

The Citizen ( journal) du 26 02 2003

" Le rôle pionnier de l’esclavage arabe est excusé. "

par Hopewell Radebe

 

L’Afrique du sud a la responsabilité politique et économique de relever le défi face au monde arabe pour mettre fin à l’esclavage qui continue de sévir depuis plus de 500 ans ont dit des intellectuels mauritaniens ce week-end.

Ce sentiment a été exprimé au cours d’une conférence portant sur la manière dont le monde arabe a amené l’esclavage en Afrique.

Cette conférence était organisée par le centre national des hautes études sur la société africaine(CASAS) et par l’Institut Drammeh de New York.

Mohamed Yahya Ould Ciré a dit que l’Afrique du sud en tant que premier leader de l’union africaine devrait avoir le courage d’introduire des initiatives anti-eclavagistes dans son agenda et d’user du programme du NEPAD pour mettre fin à l’esclavage en Mauritanie et au Soudan où il est encore pratiqué.

Il appelle les Africains à se mobiliser au sein de la diaspora " pour la libération des Africains réduits à l’esclavage en Afrique. "

" Peut-être c’est le moment de former un mouvement mondial contre l’esclavage en Afrique et de dire la vérité au monde arabe, " a-t-il dit.

La conférence a aussi condamné les pays africains pour leur trop grande dépendance vis à vis des Etats arabes en ce qui concerne l’aide, de telle façon qu’ils choisissent le silence face à la réduction à l’esclavage de communautés, particulièrement celle du Nord et de l’ouest africain.

Dr Garba Diallo a dit : " il n y a guère de documents reconnaissant la résistance et les luttes des africains esclaves dans les mains de leurs maîtres arabes. "

Il n'y a pas de recherche sur le commerce des esclaves qui est même plus ancien de 400 ans que celui du commerce des esclaves des occidentaux.

De nombreuses personnes ont souvent trouvé des excuses essayant de décrire le commerce esclavagiste des arabes comme étant moins violent que celui de l’occident.

Il a dit que des millions de personnes sont mortes dans des conditions inhumaines pendant qu’elles étaient transportées et vendues aux Etats arabes et asiatiques.

 

Historique d’un détournement de deniers publics par Ahmedou Ould Saleck soutenu par deux tribus : Idaouali (la sienne) et Smassid, celle du chef de l’Etat Ould Taya.

 

Nommé consul général de Mauritanie en Guinée Bissau le 12 août 1992, je suis entré en fonction le 2 septembre de la même année.

En 1993, de passage, à Dakar (Sénégal), Mohamed Ould Mohamed Ali, ancien consul général de Mauritanie au Sénégal m’a rendu une visite à l’hôtel El Baraka. Il me dit d’une part qu’il est le parent proche d’Ahmedou Ould Saleck comptable du consulat que je dirigeais. Leurs deux mères sont des sœurs. D’autre part qu’il souhaitait que je puisse aider celui-ci car il était à 5 ans de la retraite et qu’il n’avait pas de maison ni à Nouakchott, ni à R'kiz, ni à Bareyna, lieu où résidaient ses parents. Ma réponse a été de demander comment pourrais-je aider Ahmedou Ould Saleck. Ce qui causa en plus chez moi un étonnement est qu’il percevait régulièrement un salaire et d’autres avantages liés à sa fonction de comptable.

En réponse Mohamed Ould Mohamed Ali, me dit que nous étions tous deux du même département de R'kiz, et que nos deux tribus se connaissaient, nous pourrions donc nous comprendre. En somme des propos d’un mauvais genre.

Le 24 février 1996, au matin, je reçus en Guinée Bissau un appel téléphonique de la part de Mohamed Ould Mohamed Ali. Il insiste de nouveau pour que j’aide Ahmedou Ould Saleck puis il enchaîne en disant que chaque fois que ce dernier est passé à Dakar, il s’est plaint de moi et me reproche de pas être généreux financièrement.

En réponse à Mohamed Ould Mohamed Ali, je dis ceci : " Il est votre parent. Le budget du consulat que vous dirigez est supérieur à celui du consulat en Guinée Bissau. Vous pouvez le prendre comme comptable ainsi son problème financier qui vous préoccupe tant sera résolu. "

En mars 1996, il y eut une rencontre qui réunit au Ministère des Affaires Etrangères, dans le bureau de Abderrahim Ould Hadrami, directeur du département Afrique, quatre personnes. Outre le directeur, étaient présents Isselemou Ould Mounir, ambassadeur de Mauritanie en Irak, Ahmedou Ould Saleck et Mohamed Ould Mohamed Ali. Les trois premières personnes nommées sont de la tribu Idaouali, la quatrième est de la tribu Smassid.

Au cours de cette réunion, il fût décidé qu’Ahmedou Ould Saleck devrait détourner le budget annuel de 1996 du consulat de Mauritanie en Guinée Bissau. Il obtient ainsi le feu vert et le soutien de hautes autorités de l’Etat. Il fût aussi décidé que si le consul général, que j’étais, déclenchait une procédure de vérification, tout doit être fait pour lui imputer la responsabilité du détournement. Les personnes en question, savent qu’un hartani ne peut avoir raison sur un maure, aujourd’hui en Mauritanie. Selon un adage maure, "là où il y a des soudane, ne s’avilissent pas les beïdane.

Ainsi en novembre 1996, 14 millions d’ouguiya, soit la moitié du budget annuel du consulat, furent transférés de la banque centrale de Mauritanie vers la Gambie et non vers la Guinée Bissau où se trouve le consulat. Cette somme fût détournée par Ahmedou Ould Saleck, assisté par Mohamed Ould Dah, grand commerçant à Dakar et associé de Mohamed Ould Mohamed Ali, ancien consul de Mauritanie au Sénégal.

En ma qualité de consul général, j’ai informé le Ministère des affaires étrangères et sollicité une inspection financière auprès du Ministère des Finances. Après une longue période d’hésitation, les deux Ministères décidèrent d’une double inspection, financière et administrative. J’aborderai dans cet article l’inspection financière. Il sera question de l’inspection administrative dans un article ultérieur.

L’inspecteur des finances désigné était M. Ba Houdou Abdoul. L’inspection devrait couvrir la période allant de 1988(année d’ouverture du consulat) à 1997 (année de l’inspection). Le rapport de cette inspection a mis en cause la gestion de Mekhalle Ould Sidi, premier consul général de 1988 à 1989, celle de Bilal Ould Werzeg, deuxième consul général de Mauritanie de 1989 à 1992, ainsi que la gestion de Mohamed Vall Ould Dah, consul première classe, en poste en Guinée Bissau de 1990 à 1995.

Les consuls première classe sont des chargés d’affaires qui gèrent les consulats pendant les absences prolongées ou momentanées des consuls généraux. Ils sont responsables de leur gestion. Le rapport a surtout mis en cause la responsabilité du comptable Ahmedou Ould Saleck de 1988 à 1997.

De retour à Nouakchott, l’inspecteur Ba Houdou n’a pas eu à convoquer les deux anciens consuls généraux. Mekhalle Ould Sidi était la quatrième personnalité du PRDS (parti Républicain Démocratique et Social), au pouvoir. Bilal Ould Werzeg était en poste à Washington comme ambassadeur. En revanche Ba Houdou a convoqué Mohamed Vall Ould Dah qui travaillait au cabinet du Ministre des affaires étrangères. L’intéressé a refusé de répondre à la convocation. Ba Houdou s’est rendu au Ministère des affaires étrangères pour l’entendre. Mohamed Vall a refusé tout entretien. Pire son jeune frère, agent de la police politique à la présidence de la république, s’est chargé de régler le problème. Armé de son pistolet, il s’est rendu au Ministère des finances et a demandé après Ba Houdou. Dés que la rencontre se fut, le policier demanda à Ba Houdou de le suivre en dehors du Ministère. Il lui intima l’ordre de laisser en paix son grand frère, car dit-il "car Mohamed Vall n’est pas concerné par la gestion du consulat. " Ba Houdou explique au policier les raisons pour lesquelles, il voudrait rencontrer Mohamed Vall, en lui confiant que ce n’était pas nécessairement pour lui imputer une responsabilité de détournement. En réponse le policier mit son pistolet sur la poitrine de Ba Houdou - les Maures disent " beyne Ijil woul bass  (entre la peau et les habits)- et lui dit : " Si jamais tu mets en cause mon frère dans ton rapport, je tuerai. "

Finalement, Ba Houdou, sous l’impulsion de pressions, finit par abandonner son enquête. Le premier rapport qu’il avait établi fut écarté et sous la pression des Ministères des affaires étrangères et des finances, un nouveau rapport fut élaboré. Dans ce rapport de circonstance tout a été fait pour me rendre coupable de détournement. Moi qui avais demandé une inspection, je finissais par me retrouver incriminé.

Comme en matière de finances, la responsabilité du comptable ne peut être exclue (surtout celle de l’unique comptable qu’a connu le consulat de 1988 à 1997), Ahmedou Ould Saleck fût ainsi mis en prison.

Constatant que leur fils était sous les verrous, la tribu Idaouali se mobilisa en envoyant Abderrahim Ould Hadrami afin de rencontrer Ahmed Ould Taya, grand frère du chef de l’Etat. Il faut noter que la première épouse de Ahmed Ould Taya est de la tribu Idaouali. Ainsi autour d’un couscous et d’un thé mauritanien mon sort fut scellé. Abderrahim Ould Hadrami a dit textuellement ceci à Ahmed Ould Taya : " La tribu Idaouali m’envoie vers vous pour vous dire que notre fils Ahmedou Ould Saleck est en prison. Or le consul général, avec le quel il a servi n’a pas été inquiété. Seul le chef de l’Etat peut décider de son sort. La tribu Idaouali vous demande d’en parler à votre frère, le chef de l’Etat. " En réponse une promesse ferme fût donnée faite par Ahmed Ould Taya pour le règlement de cette question.

La rencontre sus mentionnée a eu lieu un mardi de fin décembre 1997. Le jeudi soir suivant Ahmed Ould Taya dîna avec son frère chef Etat. Le samedi suivant (premier jour de la semaine de travail en Mauritanie), Mohamed Ould Maaouya, secrétaire général du Ministère des affaires étrangères m’a rapporté les instructions du chef de l’Etat : "  Vous devriez rapidement procéder à la passation de service et rentrer à Nouakchott. "

Platon et Aristote s’accordent à dire que la première vertu d’un homme politique est la justice. En Mauritanie, il n’y a pas de justice pour les Noirs en général, encore beaucoup moins pour la communauté Haratine. Il y a surtout dans ce pays une justice tribale et raciale.

Pour conclure, il est nécessaire d’apporter les précisions suivantes :

1) En 1986, alors que j’étais conseiller à l’ambassade de Mauritanie à Paris, j'ai été choisi par Ahmed Ould Mineya, ancien Ministre des Affaires étrangères et Hamoud Ould Ely, ancien ambassadeur en France pour être affecté au consulat général de Mauritanie à Paris, comme consul première classe et chargé d’une mission, celle de mettre fin au trafic de document administratifs (carte consulaires sauf conduit, laisser passer, attestation d’hospitalisation etc.), qui sévissait dans cette institution. Je me suis acquitté de cette tâche pendant six ans (1986-1992). Sur ce sujet, les ressortissants mauritaniens, en France, peuvent témoigner.

2) En 1996, je dénonçai un détournement de deniers publics fait par et profit de maures, je redeviens à partir de ce jour ce que j’ai toujours été pour les Maures, un vulgaire hartani. Quelle est la différence entre le consulat de Mauritanie à Paris et celui de Guinée Bissau ?

A Paris, le trafic était fait par et au profit de Noirs et d’une marocaine naturalisée mauritanienne. Ainsi les des intérêts maures n’étaient pas en jeu. A Bissau, le détournement est fait par et au profit des maures.

3) Indépendante depuis 1960, la Mauritanie a, aujourd’hui, quarante trois missions diplomatiques et consulaires, Quatre vingt dix neuf pour cent de ces missions sont occupés par des arabo-berbères. De 1960 à ce jour, jamais un arabo-berbère n’a été inquiété pour sa gestion financière. Au contraire il est conçu d’une manière implicite que la nomination à certaines fonctions est un moyen pour permettre, à certaines personnes considérées comme étant au-dessus de la loi, de s'enrichir.

En tout cas le fait qu’en matière de gestion, les maures ne soient, que rarement inquiétés révèle, les pratiques racistes des pouvoirs maures successifs.

M. Mohamed Yahya Ould CIRE

Président de AHME 

  Retour