A.H.M.E.

INTERVIEW 13:

 

                 img4.gif    Interview de Abdoul Sarr, président de l'AVOMM au site avomm.com

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Ousmane Abdoul SARR le président de l'AVOMM répond                         aux questions du site avomm.com

 "Les partis politiques chez nous sont tous à base ethnique, parce qu’on ne se définit pas à partir d’un programme politique mais par rapport à sa tribu ou au leader de son parti. C'est pourquoi, ce coup d’état, en aucun cas ne doit être l’origine de l’éclatement de l’AJD/MR qui serait une très grande perte pour nous."

Bonjour Ousmane, nous vous remercions de prendre le temps de répondre à nos questions pour le site de l’AVOMM.

Mariame Kane. : Ousmane, l’AVOMM a condamné très rapidement le coup d’état du 6 août 2008. Depuis lors elle n’arrête pas de manifester contre la junte, avec le FNDD-France et les FLAM. D’aucuns disent que l’AVOMM est de plus en plus un mouvement politique, que leur répondez vous ?

Ousmane SARR : J’espère que la condamnation du coup d’état n’est pas un reproche; je sais que les militants de l’AVOMM, ou la presque totalité, sont des démocrates convaincus, non violents et qui souhaitent un processus démocratique apaisé pour notre pays. Et cette décision de condamner le putsch a été prise par le bureau exécutif de l’AVOMM. J’espère aussi que vous ne nous reprochez pas de manifester contre les putschistes avec les partis politiques et associations des droits de l'homme qui composent le FNDD en France et les FLAM, pour continuer à dénoncer ce coup d’état et à exiger le retour à la légalité constitutionnelle, la libération du président Sidi et son rétablissement dans ses fonctions de président de la république.

A ceux qui disent que l’AVOMM est de plus en plus un mouvement politique, moi j’entends l’AVOMM s'intéresse à la politique en dehors de son créneau d'organisation de victimes à vocation humanitaire et de droits de l’homme. Rien ne nous interdit de nous intéresser au destin de notre pays, de nous battre pour contribuer à la construction de la nation mauritanienne en devenir, de nous mobiliser pour que justice soit rendue aux veuves, aux orphelins et à toutes les victimes de Taya.

L’AVOMM n’est pas une organisation ordinaire des droits de l’homme qui dénonce des bavures des forces de l’ordre et qui croise les bras. Nous sommes une organisation engagée, née de la volonté de rescapés négros mauritaniens du système Taya et forgée dans les geôles de Mauritanie.

Oui nous affirmons des positions politiques, nous en avons le droit, des exigences qui s’appellent : partage équitable du pouvoir entre toutes les communautés du pays, égalité de tous les citoyens face au droit à l' éducation, à la santé et au marché du travail, lutte contre l’impunité, retour digne des déportés et leur rétablissement dans leurs droits de citoyens. Notre vocation n’est pas de devenir un mouvement politique comme vous dites, le cadre actuel de notre organisation reconnue en France et en Mauritanie par la classe politique mauritanienne, peut porter notre combat aux côtés d’autres formations politiques et des droits de l’homme.

Mariame Kane : Avant la chute de Sidi vous n’arrêtiez pas de le fustiger et aujourd’hui vous le soutenez ?

Ousmane SARR. : Nous fustigions la politique de Sidi, nous étions dans notre rôle, le combat que je vous ai décrit plus haut nécessite de dire des choses, de dénoncer, de se plaindre devant des juridictions nationales ou internationales, de ne pas être trop conciliant avec le pouvoir, même si Sidi nous avait rassurés sur sa volonté de se pencher sur nos revendications. Nous attirions son attention, nous avons vu se dessiner le plan des putschistes, à travers certaines promotions de présumés criminels ou tortionnaires et les manœuvres sous commande des députés"frondeurs".

Je vous rapporte une anecdote. Notre mission qui était revenue de Mauritanie nous avait alertés le 13 juillet dernier, lors d’une assemblée générale de l’AVOMM. L’un d’eux avait dit qu’il fallait s’attendre à un coup d’état contre Sidi. Nous lui avions tendu une déclaration que nous avions faite dénonçant les agissements des frondeurs soutenus par des généraux, il avait répondu, bien vu, pourvu que nos autorités la lisent. Je pense qu’elles ne l’avaient pas assez lue

Nous faisions des pressions sur le régime Sidi pour qu’il aille plus vite aux réformes, mais pas pour nier son pouvoir ou le destituer, mais plutôt pour l’encourager à s’attaquer aux problèmes qui nous tenaient à cœur : le passif humanitaire, le retour des réfugiés et la mauvaise cohabitation, nous avions dit tout ça à Sidi, ici à Paris.

Mariame Kane : La junte veut régler le problème du passif humanitaire et tous les problèmes liés au processus démocratique, vous avez rejeté les journées de concertations proposées par le premier ministre, ne craignez vous d’être marginalisé ?

Ousmane SARR : Franchement, la junte !!! Régler le passif humanitaire! D’abord dans aucun discours ni des militaires, ni de « Moulay La Gaffe » personne n’a lu semblable affirmation. Ensuite les journées de concertations, nous avons été conviés à des journées de concertations par le régime Sidi, Aziz était déjà là. Nous avons dans nos rangs des gens qui connaissent Aziz mieux que quiconque, et même, il compte des amis dans notre organisation. Mais aucun d’eux ne le soutient aujourd’hui, il est devenu pour tous un général indigne qui préfère son fauteuil au bien-être du pays, un soldat qui ne pense qu’à ses intérêts personnels. Nous ne sommes pas concernés par des journées de concertations organisées par les putschistes et rassurez vous, nous ne sommes pas marginalisés.

Aziz fut l’ami de feu Lieutenant SARR Amadou exécuté le 6 décembre 1987, que réserve-t-il à la famille de ce martyr et aux autres? Rien. Il s’est adressé à la Mauritanie qu’a-t-il dit sur le passif humanitaire? Rien. J'espère avoir répondu à votre question.

Mariame Kane : La communauté internationale refuse le coup d’ état, et des sanctions contre la Mauritanie semblent se profiler à l’horizon, quel est votre point de vue à ce propos?

Ousmane SARR : Ma réponse à cette question sera assez courte. Je suis pour des sanctions sévères contre la junte, et son gouvernement. Il faut les interdire de voyager eux et leurs familles. Il faut interdire aux députés qui soutiennent le putsch de voyager et délivrer des mandats d’arrêts internationaux contre eux pour haute trahison. Car ces députés ont trahi leur mandat, violé la constitution qu’ ils étaient sensés défendre en soutenant des hors la loi. Il y va de la crédibilité de l’UA, de UE , des États-Unis, de la France, du Canada et de tous les démocrates de la planète. Sanctionner les putschistes, ce n’est pas sanctionné le peuple mauritanien.

Mariame Kane : Vous aviez appelé, il y’a quelques mois l’AJD/MR et les FLAM à s’entendre, dites-vous encore aujourd’hui la même chose ?

Ousmane SARR: Oui, je dis encore aujourd’hui la même chose, demain je dirai encore la même chose. J’avais ajouté : …tendre la main à Messoud ould Boulkheir.

Vous savez l’avantage que nous avons à l’AVOMM, c’est de pouvoir dire les choses sans langue de bois et justement.

Notre problème nous Noirs mauritaniens est un problème d’égalité devant la loi, de promotions de nos langues, de partage du pouvoir, d'esclavage, de racisme bref de cohabitation difficile avec nos compatriotes arabo-berbères qui se sont accaparés de l'état, de l' économie, du pays. Les partis politiques chez nous sont tous à base ethnique, parce qu’on ne se définit pas à partir d’un programme politique mais par rapport à sa tribu ou au leader de son parti. C'est pourquoi, ce coup d’état, en aucun cas ne doit être l’origine de l’éclatement de l’AJD/MR qui serait une très grande perte pour nous. Les négros mauritaniens et tous les patriotes sincères ont besoin de cette formation politique qui devra encore se consolider pour continuer à exiger l'égalité de tous les citoyens et citoyennes sans distinction de race ou de couleur. Nous soutenons la démocratie, aussi avec Samba THIAM, Ibrahima SARR, Mourtoudo DIOP, BA Mamadou Alassane, et d'autres, nous devons savoir que sans le règlement de la question de la cohabitation, les haratines et nous serons toujours des citoyens de seconde zone et occuperons toujours deux ou trois postes ministériels dans un gouvernement, quelque soit le pouvoir en place. Et c’est ensemble, je dis bien dans la solidarité et le respect mutuel que nous pourrons faire avancer notre cause, par la voix des urnes donc du suffrage universel.

Mariame Kane : Mr le président , nous vous remercions pour la clarté de vos propos.
Ousmane SARR .C’est moi qui vous remercie.
Propos recueillis par Mariame Kane.

 

 

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