A.H.M.E.

COMMUNIQUE 222 :  

 

 

Pacte politique pour une refondation de la Mauritanie

ven, 07/03/2009

Adresse aux candidats à l’élection présidentielle du 18 juillet 2009

Depuis quelques décennies, la Mauritanie sombre, lentement, dans un autoritarisme, vecteur d’instabilité et d’incivisme. Dans la course à l’allocation des richesses par la privatisation de la chose publique, le putsch, comme usage de la dissuasion afin d’usurper et de garder le pouvoir, est devenu le mode privilégié de la régulation au sommet de l’Etat. Caricature en l’espèce, nous détenons, dans le Maghreb et l’espace sahélien, un record auquel la transition de 2005-2007 devait mettre un terme définitif.
Le peuple mauritanien dans sa majorité silencieuse aspire profondément à une rupture radicale d’avec la complaisance envers cette forme d’accès au pouvoir, le détournement de la loi et le mépris des humbles; hélas, les coups d’état succèdent aux révolutions de palais pour ne produire, toujours, que la captation d’immenses profits et la perpétuation de la mauvaise gouvernance. Les contradictions présentes de la Mauritanie, malgré l’ancienneté de leurs racines, se consolident dans cette faute originelle – mais consciente – qui consiste à différer sans répit voire reporter sine die le moment de vérité au stade de la vie d’un peuple où le mensonge et l’omission ont fini par domestiquer l’esprit critique et réduire l’exercice social des vertus de générosité et de solidarité.
Aujourd’hui, la Mauritanie a besoin, au moins pour prétendre survivre, de récréer sa communauté de destin ; l’objectif requiert, de l’ensemble de nos concitoyens, un minimum d’aptitude à l’introspection et une nouvelle pédagogie du vivre ensemble, dans le respect des règles universelles de civilisation d’où la nécessité d’éradiquer, des méthodes d’alternance politique, l’usage de la force et de l’intimidation du fort au faible.
En dépit de leurs annonces, aucun des changements sur le mode de la contrainte armée ne réalisa un semblant de croissance soutenue, d’assainissement ni suffisamment d’infrastructures de bases ; empêtrés dans les défis de la défiance policière, d’autoconservation et d’accumulation primitive des richesses, les dirigeants sombraient dans l’égoïsme et la paranoïa, perdant ainsi toute attache à la misère, aux inquiétudes et attentes, sans cesse déçues, de la population. Faute de tranquillité dans la rue et d’autonomie de l’appareil judiciaire, la corruption mine la confiance des investisseurs ; la pauvreté accentue la dépendance extérieure et la concurrence entre élites autour du partage des maigres ressources dérive vers l’inimitié mortelle. L’exclusion, la torture et le meurtre se banalisent ; la démystification collective de la violence engendre la démocratisation de la vengeance privée. C’est ce péril imminent que nous souhaitons épargner à la Mauritanie.
Aussi, nous initiateurs de la présente alerte, exigeons des candidats à l’élection présidentielle du 18 juillet 2009, de prendre des engagements solennels et précis, y compris durant leur campagne, sur les préalables à la refondation d’un projet national et pluraliste en Mauritanie, enfin émancipé du racisme, de l’esclavage et du tribalisme, toutes entraves à l’optimisme et parmi les nouvelles générations chez qui le sentiment et la possibilité d’appartenir au même avenir s’érode, se dissipe puis déserte la mémoire. Partant, se raréfie l’esprit d’entreprise, le sens de l’effort, le mérite par la compétence et jusqu’à la sérénité de se sentir en sécurité chez soi.

Grand temps est donc venu, comme y parviennent tous les groupes humains, de tirer les leçons de nos épreuves et d’induire quelque prudence de nos erreurs. Ainsi, interpellons-nous le futur Président de la République Islamique, sur quelques défis majeurs à la continuité de la Mauritanie :
1/ Le coup d’état militaire, de même que la violation des articles de la Constitution relatifs
à la prolongation du nombre des mandats présidentiels, relèvent de la forfaiture. Seuls une réforme de la loi fondamentale et des actes de coopération préférentielle avec les démocraties parmi nos voisins et partenaires au développement comporteraient assez de précaution contre un tel risque ;

2/ L’enseignement civique de base et la formation permanente des forces armées et de sécurité aux préceptes de liberté et de dignité humaine contribueront à reconstruite la vigilance citoyenne, donc l’aptitude de la société à se défendre devant l’arbitraire. L’éducation nationale comporte, de l’école primaire à l’université, la nécessité de rappels périodiques à la réalité de la menace.

3/ La révision des conditions d’éligibilité s’attachera à limiter l’errance et le nomadisme en politique, par l’instauration du mandat impératif ; en même temps qu’elle favorise la stabilité des gouvernements, la restriction bride la vénalité des allégeances tribales d’où le gain, en termes de proximité, de l’élu et de l’électeur.

4/ Une réflexion dépassionnée suivie de l’abrogation de la loi sur la double nationalité permettra, à la Mauritanie, de renouer avec ses communautés en dispersion, vecteur de renouveau intellectuel et moral, d’apport matériel et surtout formidable potentiel de résistance à l’arbitraire.

5/ Enfin, l’exercice d’introspection et de remise à niveaux de toutes les causes de discorde dans la société, permettra d’engager la réconciliation des mauritaniens à partir de matériaux garants de durée, tels la confiance, le souci de la vérité, la réparation du préjudice et la prévention de la récidive.

Notre appel s’adresse, sans exclusive, aux candidats à l’élection présidentielle du 18 juillet 2009 ; le Collectif des Cadres Mauritaniens Expatriés (CCEM) se tient à leur disposition, pour mieux expliquer la démarche, recueillir et publier les engagements de chacun, puis en assurer le suivi au lendemain du scrutin.

Le 3 juillet 2009

Liste des signataires

 

 

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