A.H.M.E.

ARTICLE 69 :

 

Partage du pouvoir : cette tribu nommée "Lehratines"

 

 

Partage du pouvoir : Cette tribu nommée « Lehratines »


    Les Haratines (s)ont-ils une tribu ? C’est la question, essentielle, à laquelle j’essaie de répondre ici, non pas du point de vue sociologique mais purement politique.

    La question Haratine relève aujourd’hui d’un mythe qui est en train de s’éfondrer de lui-même ! Non pas qu’il n’y a plus des «
     abid » - esclaves – à libérer ou des séquelles à effacer mais parce que l’exploitation outrancière de l’esclavage en Mauritanie a fini par révéler le caractère opportuniste de cette question. Donnez-moi le nom d’un seul leader de cette communauté qui soit devenu « quelque chose » (aad chi), au sens populaire du terme, sans que le label « Haratine » n’est constitué un tremplin pour sa promotion !

    Cette voie royale a été empruntée fréquement du temps de
    Ould Taya par ceux qui ont joué la carte négationniste du pouvoir contre ceux qu’on accusait de surenchère. D’un côté, Boîdeil Ould Houmeid, Sghair Ould M’bareck, Mohamed Ould Haïmer, Achour Ould Samba, rejoint plus tard par de jeunes loup comme Mohamed Salem Ould Merzoug et Cheikh Ahmed Ould Zahav, de l’autre Messaoud Ould Boulkheïr, Boubacar Ould Messaoud, Oumar Ould Yali !



     Il s’agissait souvent, sans qu’on le dise vraiment, de deux visions opposées des rapports intra-communautaires maures blancs-maures noirs pour arriver au même résultat :
    l’implication des intellectuels de cette communauté dans la prise de décision sous couvert de
    l’émancipation des habitants des adwabas (bourgs d’esclaves affranchis) et des bidonvilles des grandes villes. Ainsi, le caractère sociale de la question Haratine a fini par être inhibé par son exploitation politique.

    Les leaders Haratines cités plus haut ont réussi à devenir ministres de la République alors que le Combat est loin d’être fini ! En trois décennies de «
     lutte », la politique a pris le dessus sur le social pour transformer les Haratines, partie intégrante de la communauté arabe de Mauritanie, en une tribu qui réclame, comme toute autre, sa part du gâteau ! Malheusement, ce sont ceux qui parlent en son nom qui récolte les dividendes de l’exploitation de la question, au grand dam des laissés-pour-compte qui ne comprennent rien à ce qui se passent autour
    d’eux.

    Le nouveau pouvoir vient de répondre à une vieille exigence des militants anti-esclavagistes en proposant au Parlement un texte réprimant cette pratique en Mauritanie. Je crois que ce
    n’est pas là le plus essentiel car le texte en question n’est pas la meilleure façon de venir en aide aux centaines de milliers de hartanis se débattant chaque jour dans la misère !

    Le traitement politico-juridique de la question coupe certes l’herbe sous les pieds des militants anti-esclavagistes mais il n’apporte aucune réponse à la marginalisation économique de la communauté haratine. Plutôt que de continuer à tirer sur la fibre esclavagiste dont l’intérêt, je le répète, se confond avec la promotion aux plus hauts postes de responsabilité des leaders de la nouvelle « 
    tribu » Haratine, Messaoud, Sghaïr, Boïdiel et les autres auraient dû œuvrer, maintenant que le climat politique est apaisé, pour une meilleure redistribution des ressources entre les citoyens de ce pays.

    Les
    programmes de lutte contre la pauvreté, au sein des défunts CDHLCPI (Commissariat aux Droits de l’Homme, à la Lutte contre la Pauvreté et à l’Insertion) et du CSA (Commissariat à la Sécurité Alimentaire) n’ont jamais fait preuve d’efficacité dans ce domaine parce qu’on avait le regard ailleurs. L’exploitation politique de la cause Haratine était criante par le fait que c’est uniquement dans les centres urbains que la mobilisation apportait un semblant de résultat.

    Dans les villes et villages de l’intérieur, les masses haratines restaient encore attachées à la tribu qui les a vu naître et grandir. Cette donne a toujours pésé dans le rapport de forces entre les différents segments de cette communauté nationale. C’est d’autant plus vrai que, la chute de
    Ould Taya a libéré les esprits, permettant à un Messaoud Ould Boulkheir, diabolisé à
    l’extrême par ses adversaires politiques au pouvoir, de faire entendre sa voix.

    La suite est connue : alliance avec
    Ould Daddah aux élections municipales et législatives mais volte-face à la Présidentielle qui lui a permis d’occuper aujourd’hui le fauteuil tant convoité de président de l’Assemblée Nationale. Au nom de sa tribu, il est arrivé, enfin, à récupérer sa part du pouvoir.

     

    LE 27/11/2007

    Sneiba Mohamed  
    Directeur de Publication du journal "Les Nouvelles"

     

 

 

 

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