ARTICLE 491 :

  

Les mauritaniens désertent Aqmi:
Quelle signification?

 

Ahmed Ould Weiss (photo) le jeune mauritanien qui a fui les camps d’Al Qaida au Maghreb islamique (Aqmi) au nord-Mali pour se rendre le 2 novembre aux autorités mauritaniennes s’est exprimé la soirée du 16 novembre dans le journal télévisé de 20 heures.

Habillé en boubou le teint bronzé par le soleil, la barbe allégée,
Ould Weiss a paru quelque peu confiant annonçant qu’il avait été poussé à rejoindre un terrain du jihad mais qu’il s’est rendu compte qu’Aqmi faisait des choses contraires à la religion.

Il s’exprimait probablement chez lui ou dans l’une des résidences des services de sécurité devant des journalistes des medias publics, les seuls, à avoir eu l’exclusivité, sans pour autant donner à l’événement sa signification.

Avec cette reddition suivie quelques jours après, par celle de 5 autres mauritaniens encore «en débriefing» dit-on, la Mauritanie engrange les résultats de sa politique anti-terroriste qui allie à la pression militaire sur le terrain, une approche nouvelle, basée sur le dialogue et la persuasion.

C’est dans ce cadre que s’inscrivent l’extinction des poursuites prévues dans une nouvelle loi contre les islamistes armés qui se rendent avant leur arrestation de la quelle a bénéficié
Ould Weiss ainsi que les grâces présidentielles accordées jusqu’ici à 52 détenus qui ont exprimé leur repentir et leur volonté de ré-épouser l’islam malékite modéré en vigueur en Mauritanie.

«
J’ai été poussé par des jeunes à rejoindre un terrain du jihad et j’étais parti content de le faire, comme doit l’être tout musulman.» a dit Ould Weiss -sur un ton très sincère- pour justifier son départ début 2009 vers les camps Aqmi dans le contexte de la sanglante offensive lancée par Israël contre Gaza.

Mais dans les camps d’
Aqmi, Ould Weiss dit s’être aperçu qu’il n’est pas sur un terrain du jihad : «Allah a fait que je parte rejoindre un groupe au sein duquel j’ai constaté que ce que l’on m’a dit n’est pas vrai». Et de poursuivre : «J’étais inquiet de l’idée de combattre ou d’orienter mon arme contre des musulmans. Je voyais se passer des choses qui ne correspondent pas à mes convictions religieuses».

Quelles sont ces «
choses» qui auront révolté Ould Weiss ? La discrimination faite aux mauritaniens d’Aqmi souvent relégués au second plan et utilisés comme chair à canon ? L’attaque de Tilwa ? La liquidation de l’otage anglais Edwin Dyer ? Les prises d’otages ? Les choix répétés de mauritaniens pour des opérations Kamikaze ? L’attaque de Tin Zouatine, on ne le saura !

Mais en plus de sa déception, d’autres facteurs auront également contribué à la reddition de
Ould Weiss : « J’ai décidé de revenir suite au dialogue établi entre des frères et les groupes dont plusieurs ont été changé d’opinion (…) et après le discours du président de la République dans lequel il a déclaré que ceux parmi nous qui reviennent au pays n’auront pas de problèmes». Et de souligner : «Cela m’a encouragé surtout qu’il y a la liberté de la prêche pour propager l’Islam, en plus de la tolérance».

De retour dans son pays après avoir séjourné un peu moins de deux ans dans les camps d’
Aqmi, Ould Weiss a semblé satisfait. Il dit avoir été relâché après avoir été entendu. «Je me suis présenté dans un commissariat de police où j’ai décliné mon identité. Ils m’ont relâché en me disant que je n’ai pas de problèmes» a-t-il affirmé dans son entretien accordé à la Télévision de Mauritanie

Natif de 1979
Ahmed Ould Weiss qui venait du nord-Mali s’est rendu le 2 novembre à la police de Timbedra (ville située à 1000 kms à l’est de Nouakchott) . Il avait rejoint les camps d’Aqmi début 2009 et a subi des entraînements sur toutes sortes d’armes et explosifs, au sein de la Katiba (unité combattante) d’ "Al Ansar", dirigée par le Touaregue malien Abou Abdel Karim. Sa reddition ainsi que celle de 5 autres mauritaniens constitue un nouveau coup dur porté à Aqmi, tout aussi fatal pour elle, que les raids militaires.

Elle constitue aussi un signal que les mauritaniens d’
Aqmi commencent à la déserter augurant de l’assèchement de ses sources de recrutement en Mauritanie. Mais il reste à savoir quelle sera l’attitude d’Aqmi vis-à-vis des mauritaniens qui l’ont fui ou qui ne sont pas encore parvenus à lui fausser compagnie et que prévoit enfin la Mauritanie pour ceux qui se rendent.

Par le passé, les autorités mauritaniennes s’étaient mal comportées avec un repenti qui avait fui
Aqmi en septembre 2008 ainsi qu’avec un groupe de jeunes (Oumeir-Dahak-Abou Mouadh) qui avaient déserté l’ex-Gspc ancêtre d’Aqmi en aout 2006, constatant que l’un des émirs a pactisé avec des trafiquants de drogue.

Traités de manière différente malgré leur expérience commune et jetés par la suite en prison certains d’entre eux ont renoué aprés leur liberation avec le terrorisme et en sont d’ailleurs morts.



17-11-2010
Isselmou Ould Moustapha


Source :
Tahalil Hebdo (Mauritanie)

Tiré de www.cridem.org

 

  

 

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