ARTICLE 432:

  

QUELLE IMAGE POUR LA MAURITANIE ?

 

Je m’efforce depuis un certain temps de suivre la TVM, «notre» télévision «nationale», mais franchement, je donne raison à ceux qui orientent leurs antennes vers d’autres chaînes car, non seulement la TVM manque de  qualités, mais aussi et surtout, elle reflète les vrais maux de la société à savoir : la monotonie, le sectarisme, le népotisme, la langue de bois et le racisme d’Etat…

Malheureusement, nos «journalistes» n’ont rien appris du passé récent car, tous ces maux ne sont pas nouveaux, au contraire c’est du copier coller, on enlève le nom d’une personne et le reste du texte ne change pas …même les noms des personnes chargées de ces programmes ne changent pas trop, voila la monotonie.

On oublie souvent que la télévision est la seule fenêtre ouverte sur le monde étranger et qu’elle doit alors refléter le vrai visage de ce pays, multiculturel et multiracial, n’en déplaise a certains ! Mais notre pauvre télévision n’est pas un cas isolé, si l’on sait que les directeurs centraux des ministères sont à 98% Maures blancs, tout comme l’administration territoriale et la diplomatie. Une tendance qui se perpétue et se constate aisément en regardant notre petit écran. On y voit les journalistes, le conseil des ministres et les délégations officielles pour ne citer que ceux-là et c’est toujours l’exclusion au grand jour …

Bizarre que l’on reçoive des invités, parfois en grand nombre, ne comptant aucun Haratine. Seuls les quelques arabisés négro-africains ont, de temps à autre, le privilège d’assister à des émissions télévisées.

Alors, fermons carrément cette télévision si nous ne voulons pas ternir l’image de notre pays! La laisser dans cette lancée, c’est continuer à accumuler le ridicule en substance!

 

J’ai remarqué une fois que les invités de monsieur Taqiyoullah étaient au nombre de huit, tous Maures blancs, comme d’habitude. Bizarrement, mon ami qui est spécialiste des tribus, m’a fait remarquer que toutes les grandes tribus étaient représentées ce soir là !! Un simple hasard, peut-être. Mais, ce même hasard ne pourrait-il jamais nous faire inviter que des Haratines ou seulement des négro-africains ou au moins, une fois n’est pas coutume, une combinaison qui inverserait l’hypothétique suprématie des Maures blancs?

 

A travers une émission animée par Bios Diallo, on sentait un quelconque souci de faire apparaître la Mauritanie dans toute sa diversité. Est-ce la raison pour laquelle nous avions mis fin à cette émission hebdomadaire qui était pourtant bien suivie.

Beaucoup de gens vont tout simplement balayer d’un revers de main ce propos en proposant d’élever le débat et d’être plus positif et plus constructif. Je tiens ici à dire à tous ceux qui ne font rien pour aider les Haratines à se promouvoir et à être des citoyens à part entière, et qui  n’aperçoivent pas le danger de l’exclusion, que pour construire il faut bien s’assurer de la fondation, car l’édifice est garanti si et seulement si la fondation est bien conçue.

Notre pays est très mal conçu et on doit impérativement reconsidérer notre vécu.

 

Alors comment est fondée notre société ? Une société tribale, esclavagiste avec des mentalités primitives (jahiliya), où l’esclave a le même statut que l’animal : on le donne comme cadeau, on le vend, on le châtie, on le viole et on reconnaît son enfant parfois après quarante ans, laissant la pauvre mère drainer la honte durant toute sa vie. Le cas de Oumlkheiry est très récent, sous le silence certes coupable de nos Imams et faqihs.

On affiche çà et là  un grand amour pour les Haratines, «nos frères», parce que l’homme, par nature, aime ses biens et parce que certains n’avaient pas de valeurs ni d’histoire. C’est pourquoi, ils avaient utilisé l’esclavage comme seul «honneur» par lequel se connaissent les «grandes familles». La grandeur de la famille, dans ces milieux, se mesurait et se mesure toujours en fonction du nombre d’esclaves possédés. Lesquels esclaves constituent aujourd’hui l’électorat d’une telle grande famille à Djiguenni, à Kankossa, à Barkéol, à Atar, à Rkiz, à Boutilimit et j’en passe. Un esclavage politique assimilable aux séquelles de la colonisation. L’indépendance des ex-colonies c’est comme l’affranchissement des esclaves. J’affranchis mon esclave pour qu’il devienne un Hartani ou, dit-on, un cousin et un frère.

C’est un peu une manière de renommer notre rapport tout en gardant la pyramide tribale telle qu’elle était.

L’Etat mauritanien se résume en une entente entre les maîtres ou un syndicat qui défend les intérêts des esclavagistes. Tu es ministre, tu prends tes anciens esclaves comme chauffeurs, cuisiniers, gardiens et gardes enfants : il faut que ces gens-là continuent à penser que tous les chemins passent par l’ancien maître, qu’il faut son intervention pour que les cultivateurs Haratine, bien sûr, accèdent aux services de l’Etat et, en contre partie, ils seront obligés de garder les relations de dépendance.

 

Comment peut-on accepter d’être malmené ainsi et pourquoi aider à entretenir cet édifice ? Comment peut-on aimer ces gens ? Cela est tout simplement incongru pour ne pas dire choquant

Il faut impérativement une refonte générale pour cette société. Cela nécessite, bien sûr, l’organisation d’états généraux de la discrimination. Il faut par exemple une commission vérité et réconciliation. Nous avons beaucoup de choses à se dire et à se reprocher, donc revenons à nous-mêmes et assumons nos erreurs, demandons pardon et acceptons que nous sommes assis sur un volcan! Notre chère patrie progresse à pas sûrs, vers l’incertain.

Alors, sauvons ce qui peut encore l’être et revenons à la copie originale de la sunna, conformément  au rite de  l’Imam Malik.

 Tout être humain peut faire des erreurs mais le meilleur c’est celui qui se rectifie et qui revient à la raison. Donc revenons à la raison tant que c’est encore possible. Il n’est jamais trop tard pour mieux faire.

Fermons cette télévision, redistribuons les richesses, condamnons le passé, qualifions l’esclavage de crime contre l’humanité et demandons pardon aux victimes. Ainsi, nous arriverons sûrement à soigner l’image de notre pays !

Les haratines aujourd’hui sont peu soucieux de l’image actuelle du pays et même de son devenir mais surtout, de leur statut d’hommes libres à cause de la marginalisation et de l’exclusion. Et pourtant, s’ils étaient bien impliqués, ils pourraient jouer un rôle primordial à l’image de  Ibn Zeid, Oussama pour ne pas dire OBAMA !!!

                                                                               

 

                                                                                            Brahim Ould Bilal Ould ABEID

                                                                                  Vice-Président de SOS DISCRIMINES

                                                                                      

 

 

  Retour