ARTICLE 406:

  

La première fonction d'un professeur est d'expliquer à ceux qui n'ont pas compris avec des termes simples et à la mesure de leur compréhension. Déraison, lyrisme, ou je ne sais quel autre terme. Nous ne sommes pas dans ce cadre là. Il y a des gens qui crèvent la "dalle". Il y a des gens qui sont exploités, il y a des gens qui ne construisent pas de patrimoine car sucé jusqu'au sang par ceux qui les dominent et qui eux construisent leur patrimoines sur leurs dos. Il y a des gens qui font appel à la justice et n'obtiennent pas gain de cause parce qu'on ose pas tout simplement leur donner raison. Et ceci chers messieurs est bien encore d'actualité dans notre Mauritanie. LYRISME, DERISION OU SIMPLEMENT PERSISTANCE DANS LA CULTURE DE L'EQUIVOQUE, DE L'AMBIVALENCE ?  CEUX QUI SOUFFRENT ONT BESOIN DE PAIN, DE JUSTICE, DE VERITE. LE DIAM, LE MACCUDO, LE ABD et LE KOMO ne sont pas l'invention de la communauté internationale. Si nous voulons sortir de nos tares et de l'archaïsme dans lequel veulent encore nous maintenir nos nantis, "nos bien nés", nos prédateurs, ils faut que nous ayons le courage de nous lever sans ambigüité aucune d'assumer notre histoire. 

Ci joint un témoignage poignant sur nos réalités. Lisez le et méditez le. Les protagonistes de cette affaire ne sont ni dans le lyrique ni dans la dérision ils sont dans les faits.

"Le wali, s’adressant au ministre, a dit : ça ne me concerne pas mais je vais te faire comprendre la situation. Si on exécute ce jugement contre ce marabout, ça va créer des tensions dans tout le pays. Donner moi le temps de convaincre le marabout pour qu’il restitue les biens. Je n’ai pas accepté cette proposition du wali. Le lendemain, le ministre est retourné à Nouakchott. Jusqu’à ce jour rien n’a été fait. C’est pourquoi, nous avons saisi les ONG défenseurs des droits de l’Homme."

Nous ne pouvons jouer avec, nous ne devons plus jouer avec.

Djibril Ba

 

Kobeni (Hodh El Gharbi): «Si on exécute ce jugement contre ce marabout, ça va créer des tensions… »

 

Aicha Oumi Mint Brahim Ould Elemine  st venue de Kobeni (Hodh El Gharbi). Elle a saisi l’Ong Sos Esclaves. Objet de la saisine : « les bien de sa sœur, Zeinabou, décédée en 2003, ont été récupéré par un marabout chef religieux.» Nous avons rencontré Aicha et son tuteur au siège de la Commission nationale des droits de l’Homme à Nouakchott. Ils ont fait les témoignages suivants:

Aicha Oumi Mint Brahim Ould Elemine  

«J’avais une soeur de même père,
Zeinabou. Elle est décédée en 2003. Elle n’a pas laissé d’enfants. Elle a laissé 900 moutons, 120 vaches, trois chevaux, deux charrettes, trois fusils et quelques ânes. C’est ce que nous savons de sa richesse. Un homme, chef religieux, se déclarant maître de ma soeur, a récupérée tous ses biens en 2004. Les biens de ma soeur me reviennent de droit. Pour les reprendre, j’ai choisi un tuteur, Mohamed El Mehdi Ould Sidi Mohamed Ould Hadj Amar, pour m’aider.»

Mohamed El Mehdi Ould Sidi Mohamed Ould Hadj Amar

«Je suis enseignant de coran à
Kobeni. Je suis voisin et ami de la famille de Aicha. Nous ne sommes pas de la même tribu. Je connais son père et ses soeurs. Je sais qu’un marabout, se considérant maître de la maman de  Zeinabou, a récupéré ses biens. C’est sur procuration de la famille que j’ai saisi le Cadi (juge) de Kobeni en 2006. Ce cadi a rendu un jugement demandant la restitution des biens à Aicha.

Il a envoyé trois convocations au marabout. Elles sont restées sans suite. Faute de l’exécution de la décision du
cadi, je suis allé voir le ministre de la justice de l’époque. Le ministre a confié le dossier à un de ses conseillers, Hamoud Ould Ramdane. Ce dernier a fait un rapport concluant à une captation d’héritage à caractère esclavagiste.

Le ministre a transmis le dossier au procureur général près la cour suprême pour exécution du jugement. Ce dernier a écrit au procureur général près la cour d’appel de
Kiffa (compétente pour le Hodh El Gharbi). Ce dernier a écrit au procureur de la République d’Aiouin pour exécution.  Le procureur d’Aioun a fait état d’un défaut de formule exécutoire.

Je suis reparti au tribunal départemental de
Kobeni et la formule a été faite. Le cadi  a proposé une exécution à l’amiable. Le greffier est allé voir le marabout qui a refusé. Je suis retourné chez le cadi qui a fait état de son impuissance. Je suis allé alors voir le procureur à Aioun en 2008, au moment de la visite du ministre de la justice dans cette ville.

J’ai fait état de l’inexécution de la décision. Quand j’ai commencé à parler au ministre, le
wali lui a dit qu’il s’agit d’une affaire privée. Le ministre m’a demandé de me taire et les gardes m’ont fait sortir de la salle.  Dans l’après-midi, j’ai été rappelé. En présence du procureur, du président du tribunal départemental de Kobneni, du wali et du ministre de la justice, je suis revenu sur l’intégralité du dossier.

Le
wali, s’adressant au ministre, a dit : ça ne me concerne pas mais je vais te faire comprendre la situation. Si on exécute ce jugement contre ce marabout, ça va créer des tensions dans tout le pays. Donner moi le temps de convaincre le marabout pour qu’il restitue les biens. Je n’ai pas accepté cette proposition du wali. Le lendemain, le ministre est retourné à Nouakchott. Jusqu’à ce jour rien n’a été fait. C’est pourquoi, nous avons saisi les ONG défenseurs des droits de l’Homme.
»

Le 03.06.09 

Témoignage recueillis par
Khalilou Diagana

source : Le Quotidien de Nouakchott

 

 

 

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