ARTICLE 382:

  

France - Mauritanie :
Au nom de la lutte contre le terrorisme ou du pétrole ?

 

 

 

Écrit par Sneiba Mohamed    -L´AUTHENTIQUE

 

" Le général Jean-Louis Georgelin chef d'état major des armées françaises est arrivé, dimanche, à Nouakchott dans le cadre d'une visite de travail en Mauritanie. Au programme de ce général 5 étoiles une rencontre avec le ministre de la défense, Hammadi Ould Hammadi, une séance de travail avec son homologue mauritanien, général Ghazwani et une tournée dans le nord du pays où les deux hauts gradés sont attendus dans les villes de Chinguitty et Atar.

L'on suppose que cette rencontre entre les deux premiers responsables militaires de la Mauritanie et de la France qui entretiennent des relations de coopération militaire depuis les années 60 du siècle dernier, entre dans le cadre de la politique sécuritaire commune de lutte contre le terrorisme et les trafics de tous genres actuellement engagées dans le grand Sahara et d'autres chaudes contrées du monde (Afghanistan, Irak) que l'on pense être alimentées en homme à partir de ce no man's land la Mauritanie, l'Algérie, le Mali et le Niger.

Mais l'arrivée en Mauritanie du patron de l'Armée française, cache mal l'activisme de hauts gradés des deux pays constaté depuis quelques semaines (tenue à Nouakchott d'un conclave sécuritaire entre militaires français et mauritaniens et visite effectuée récemment en Mauritanie par le général commandant les forces françaises au Cap - Vert). Elle aurait pu passer inaperçu si la compagnie Total, élément essentiel du dispositif de la françafrique, n'avait pas annoncé, il y a trois semaines, la découverte du pétrole dans le bassin de Taoudenni. Tout d'un coup, on se met à se demander s'il ne faut pas chercher de ce côté ce trop d'intérêt accordé par la France à la Mauritanie, un pays qui, jusque-là, n'a jamais caché sa jalousie face aux relations privilégiées que l'ancienne métropole entretient avec des pays africains comme le Sénégal, le Maroc ou la Tunisie.

 On peinerait certes à trouver toutes les raisons de cette longue lune de miel entamée depuis le soutien de la France de Sarkozy aux généraux qui ont mis fin, un certain 6 août 2008, au régime démocratique du président Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi mais derrière le paravent de lutte contre le terrorisme généralement avancé, se cache sans doute des intérêts économiques d'envergure et un positionnement géostratégique évident face à la percée chinoise et aux velléités de conquête de l'Amérique. Supplantée par l'Espagne dans le domaine halieutique, la France est en train de tout mettre en œuvre pour occuper les premières loges dans le secteur prometteur du pétrole. Ainsi, en jouant ses soutiens politiques pour consolider ses intérêts économiques et géostratégiques, la France est tout bonnement en train d'aligner la Mauritanie sur le même modèle de coopération appliqué avec succès au Gabon et au Niger, deux pays où les sociétés françaises Total et AREVA ont  bon pied depuis des lustres.

Ceci expliquant cela, l'on comprend maintenant la raison profonde du soutien apporté par la France à la junte dirigée par Ould Abdel Aziz, lors de la crise institutionnelle mauritanienne, et les accointances profondes entre groupes financiers français avec des milieux d'affaires mauritaniens.

Maintenant que le chapitre est clos, on se rend compte que le rôle de la France a été déterminant entre le 6 août 2008, date à laquelle le général Mohamed Ould Abdel Aziz, renverse par un coup d'État militaire le premier président mauritanien démocratiquement élu lors d'élections non contestées et le 5 août 2009, où lui-même sera investi président de la République Islamique de Mauritanie après avoir officiellement remporté l'élection présidentielle contestée du 18 juillet dernier. La France a - t - elle adopté Ould Abdel Aziz parce qu'il répond bien au " profil " recherché du dirigeant capable d'assurer ses intérêts dans un pays où l'insécurité est devenue, du coup, le mal le " mieux partagé " ou a - t - elle tout simplement adapté sa politique africaine, terriblement efficace au Gabon, au Niger et au Congo, à ce nouveau " cas " qu'est la Mauritanie ?

Tout semble indiquer en tout cas que le président Aziz, est vu, depuis Paris, comme le " Gardien du Temple ", le protecteur des intérêts de la France en Mauritanie.

C'est ce qui explique que, par l'intermédiaire de son président, Nicolas Sarkozy, elle s'est empressée de féliciter le vainqueur du scrutin du 18 juillet dernier et affirmer que " cette élection permet (…) une sortie de crise et la normalisation des relations de la Mauritanie avec la communauté internationale. " Sans aucun égard - ni regard - aux protestations de l'opposition mauritanienne qui, dès le jour du scrutin, avait dénoncé des fraudes et des irrégularités pouvant remettre en cause, selon elle, le résultat définitif (seules 17.000 voix permettent à Abdel Aziz d'éviter un second tour).

Le soutien de la France au nouveau pouvoir de Nouakchott est sans équivoque. Alain Joyandet, Secrétaire d'État à la Coopération et à la Francophonie, va ainsi officiellement représenter la République française à la cérémonie d'investiture du président Aziz. Le 3 août sur RMC, deux jours avant le " couronnement " du succès de la diplomatie française de l'ombre, il déclarait même que c'est " grâce à nous, quelque part, que (…) en Mauritanie, la démocratie revient  " ! A quel prix ?

Il est certain que l'implication de la France dans la politique intérieure de la Mauritanie n'a pas été faite au seul chapitre de cette fameuse lutte contre le terrorisme dont les résultats se font attendre. D'ailleurs, la coopération dans le domaine reste dérisoire puisque tout semble se dérouler sous le sceau du secret absolu. L'adoubement de Ould Abdel Aziz par la France trouve sa consécration dans la visite que celui-ci s'apprête à effectuer à Paris mi-octobre prochain. Une autre preuve que la " Nouvelle Mauritanie " compte pour beaucoup dans la politique africaine de la France de Sarko. Bon vent !

 

 

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