A.H.M.E.

ARTICLE 150 :

 

 

 

Coup d’Etat en Mauritanie : conséquences économiques du putsch

    La communauté internationale a réitéré sa ferme volonté de s’opposer au fait accompli imposé par la junte militaire qui s’est emparée du pouvoir en Mauritanie le 6 août dernier et qui semble avoir définitivement tourné la page de l’ordre constitutionnel institué en avril 2007 et qui s’était traduit par l’élection démocratique pour la première fois dans l’histoire du pays d’un Président de la République.

    Les
    Etats-Unis, la France ont suspendu leurs aides non humanitaires à la Mauritanie, l’ Union Africaine a banni le pays et l’ Union européenne s’apprête à son tour à mettre momentanément fin à son appui jusqu’à rétablissement de l’ordre constitutionnel.

    Les autres bailleurs de fonds internationaux tels la
    Banque mondiale, le FMI ainsi que les institutions financières mondiales pourraient à leur tour suspendre leur coopération avec Nouakchott.

    Ces mesures risquent de détériorer davantage les conditions de vie des Mauritaniens dont plus de la moitié vit au dessous du seuil de pauvreté. Pays classé parmi les plus pauvres du monde, la Mauritanie qui vit sous perfusion de l’aide internationale aura du mal à faire face à cet embargo international.

    Sur le plan de l’APD (aide publique au développement), la Mauritanie avait reçu en 2006 (dernière publication de l’OCDE) quelques 188 millions de dollars dont 10 % d’aides bilatérales.

    La
    France est le premier donateur de la Mauritanie avec 47 millions de dollars entre 2005 et 2006, suivi de l’Union Européenne avec 28 millions de dollars, les Etats-Unis (16 millions de dollars), l’Espagne (15 millions de dollars), le Japon et l’Allemagne (13 millions de dollars chacun). Les secteurs qui seront les plus touchées par la rupture de l’APD seront sans nul doute l’éducation, la santé, l’agriculture, les infrastructures et les services.

    Ce sont surtout les efforts considérables déployés par la Délégation à la promotion de
    l’investissement privé et l’
    Office national du tourisme qui risquent de prendre un sacré coup. La pérennité et le développement de ces deux secteurs dépendent en effet beaucoup du degré de stabilité politique dans un pays et les garanties offertes par un ordre constitutionnel fiable. Les régimes d’exception, tel celui que vit aujourd’hui la Mauritanie, ne sont pas de nature à encourager les investisseurs si frileux par rapport aux garanties de leurs fonds.

    Ce putsch risque aussi de compromettre le projet de financement du secteur éducatif financé à hauteur de 97 millions d’Euros par la
    France mais aussi plusieurs autres projets en préparation en 2008 et gérés par la Banque Mondiale, notamment les financements IDA pour le secteur privé d’un montant de 10 millions de dollars et pour le secteur des transports d’un montant de 4, 5 millions de dollars, mais aussi les 5, 3 millions de dollars prévus en janvier 2009 pour le secteur du transport aérien financé par le fonds régional de l’IDA, le réaménagement du Port de Nouakchott prévu en mars 2009 pour la bagatelle de 50 millions de dollars ainsi que les 75 millions de dollars prévus pour le volet Energie sur fonds IBRD/PPP.

    Compromis également les 2, 1 milliards de dollars que les bailleurs et partenaires mauritaniens, réunis à
    Paris en novembre 2007, avaient décidé de débloquer pour aider la Mauritanie à réaliser ses programmes de développement multisectoriel.

    Sérieusement mis en mal aussi, l’atteinte des objectifs du millénaire et le pays risque de
    n’atteindre aucun de ses objectifs de développement en 2015. Pour un pays comme la
    Mauritanie dont le sort dépend étroitement de l’extérieur, un pays qui importe tout, jusqu’à sa nourriture et dont l’économie est directement tributaire de ses exportations commerciales, un tel isolement sur le plan diplomatique est fatal à sa survie.

    Face à cet obscur horizon économique et financier qui se dessine, si aucun fléchissement
    n’intervient de la part des nouvelles autorités ou de la part des partenaires internationaux, les populations déjà à genou face à une conjoncture insupportable risquent de boire la coupe de la misère jusqu’à la lie. Car ce sont surtout les pauvres qui seront atteints de plein fouet par la dégradation sociale consécutive à la strangulation internationale. Un terreau sur lequel risque de se greffer l’insécurité et le radicalisme.

    Cheikh Aïdara

    Le 13/08/08

     source : L' Authentique (Mauritanie)                                                                                                                                                                                         Tiré de www.cridem.org

     

 

 

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