TEMOIGNAGE 78:

 

A.H.M.E.

 

  

 

Litige foncier à Coumba NDaw (Guidimakha) sur fond d’esclavage

    A la veille du jugement en délibéré de la cour d’appel du tribunal régional de Kiffa relatif au litige foncier opposant la famille Cissokho à Aly Camara, l’AMEES (Association Mauritanienne pour
    l’Eradication de l’Esclavage et ses Séquelles) rappelle que ce litige date de l’hivernage 2003 quand
    Ali Camara, notable du village de Coumba N' Daw à18 km au sud de Sélibaby (Guidimakha) s'est présenté chez Sourakhé Cissokho descendant d’esclaves pour lui demander de libérer le champ qu’il cultive depuis plus de quarante ans sous prétexte qu’il l’a hérité de ses grands parents.

    Face au refus de la famille
    Cissokho pour laquelle ce champ constitue la seule source de survie et qu’elle met en valeur depuis plus de quarante ans, Ali Camara a entrepris des démarches infructueuses d’abord chez le chef de village, puis, chez le chef d’Arrondissement de Khabou.

    Ce dernier lui signifiera que cette terre ne pourra être retirée à ceux qui l'occupent actuellement, en l'occurrence la famille Cissokho. Il lui conseilla d'oublier ses prétentions esclavagistes, contraires à la loi en vigueur.

    En 2007, soit quatre années après, Camara reviens à la charge et porte l’affaire devant le tribunal de Sélibaby. Le procureur lui notifiera que cette terre appartient à ceux qui l'on travaillé.

    En 2008,
    Ali Camara porte l’affaire devant le Cadi de Sélibaby. Ce dernier rendra un jugement en sa faveur, notifiant par la suite aux anciens esclaves qu'ils pourront faire le recours en cassation ou se faire payer la contrepartie des constructions déjà existantes sur la parcelle.

    D’après les informations à la disposition de l’
    AMEES, Mr Camara bénéficie du soutien d’un lobby esclavagiste bien introduit auprès de l’administration locale et dont les noms ne lui sont pas étrangers.

    Ce litige foncier de
    Coumba NDaw n’est que la partie visible l’Iceberg. En effet, dans plusieurs localités soninkés du Guidimakha et du Gorgol (Bouanze, Diaguily, Diadjibiné, etc.), la question foncière se pose avec beaucoup d’acuité surtout quand tombent les premières pluies. Les descendants d’esclaves, considérés eux-mêmes comme la propriété de leurs maîtres ou anciens maîtres, sont sommés de libérer les terres qu’ils cultivent depuis plusieurs générations, à chaque fois qu’ils sont en mal avec leurs anciens maîtres.

    Ces litiges fonciers concernent généralement des terres collectives, défrichées et mises en valeur par des descendants d’esclaves.

    Or, l’article premier de l’ordonnance n° 83.127 du 5 juin 1983 dit : «
    La terre appartient à la nation et tout Mauritanien, sans discrimination d’aucune sorte, peut, en se conformant à la loi, en devenir propriétaire, pour partie ».

    Dans son article 3 cette ordonnance dit : «
    Le système de la tenure traditionnelle du sol est aboli » et dans l’article 6 « Les droits collectifs légitimement acquis sous le régime antérieur, préalablement cantonnés aux terres de culture, bénéficient à tous ceux qui ont, soit participé à la mise en valeur initiale, soit contribué à la pérennité de l’exploitation ». Certes, une loi incriminant
    l’esclavage et les pratiques esclavagistes a été promulguée mais son application n’est pas effective.

    L’
    AMEES, s’indigne de l’attitude d’Ali Camara et la décision de justice du Cadi de Sélibaby, contraire aux lois de la république. Elle apporte son soutien sans failles à la famille Cissokho dans cette épreuve qui lui est imposée.

    L’
    AMEES lance un appel pressant aux organisations œuvrant pour le respect des droits humains pour qu’elles se mobilisent afin que justice soit faite à la famille Cissokho. Ce procès en cours est celui des pratiques esclavagistes en milieu Soninké. Aux autorités nationales, l’AMEES demande que la loi puisse protéger les couches les plus vulnérables de la société.

    Le Bureau Exécutif

    Le 17/08/08

     source : www.cridem.org

 

 

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