TEMOIGNAGE 29:

 

A.H.M.E.

L'ancien chef de l'Etat professe l'impunité

 

 

L’ANCIEN CHEF DE L’ETAT MAURITANIEN, ELY OULD MOHAMED VALL PROFESSE L’IMPUNITE

 

Le 27 septembre, le Colonel Ely Ould Mohamed Vall, Président du Conseil Militaire pour la Justice et la Démocratie (CMJD), se prêtait, à Paris, aux questions des journalistes, dans les locaux du Centre d’Accueil de la Presse Etrangère.

 

A la faveur d’une interrogation par un journaliste africain  sur le racisme et l’esclavage, le Chef de
l’Etat mauritanien s’est livré au double discours de la relativisation, puis de la dénégation, un exercice de confusion auquel il nous a habitués depuis son arrivée au pouvoir, le 3 août 2005, date du renversement de la dictature sanglante du Colonel Ould Sid’Ahmed Taya. Le successeur,
ex-Directeur Général de la Sûreté Nationale, reprendra, à son
  compte, les montages et contre-vérités de la police politique, dès qu’il se trouve sollicité sur les problèmes de servitude traditionnelle et de l’impunité des crimes ethniques de l’entre 1989 et 1991.

 

En droite ligne de ses déclarations antérieures, le Président mauritanien a parlé d’un  « commerce misérable », faisant allusion aux mouvements de lutte contre les discriminations et l’esclavage. La question, de son point de vue, était « dépassée ». Le procédé ne varie pas depuis des décennies, dans le discours des élites dominantes : la victime qui proteste de son droit devient un extrémiste, coupable de susciter la guerre civile ; son cri de douleur et de révolte se heurte à la stigmatisation, en une attitude vénale, aux fins de capter des financements étrangers. Ici, le Colonel Ould Mohamed Vall ne se positionne pas en président des mauritaniens mais tient, debout, la sentinelle du système d’hégémonie tribale, avec une vigilance et un zèle où transparaît, dans la voix, une indisposition, très personnelle, devant l’évocation de certaines abus de la société.

 

Dans son propos face aux journalistes parisiens, le Chef de l’Etat se risquera aussi, à nier, contre
l’évidence des faits récents, son implication dans l’encouragement des candidatures indépendantes.

 

Sur ces deux sujets, SOS Esclaves :

 

- Réaffirme que les pratiques esclavagistes, et l’amnistie des auteurs de tueries et de déportations à caractère racistes, constituent une réalité significative sur le territoire de la Mauritanie ; pour s’en convaincre, il suffit de se reporter aux décisions, intervenues, respectivement en 2000 et 2004, de la part de la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (CADHP) et du Comité pour l’Elimination de la Discrimination Raciale (CERD, organe des Nations Unies). De même, il importe de se reporter aux points 14 et 15 des 24 engagements de la Mauritanie devant l’Union Européenne, dont aucun, à ce jour, n’a connu un début de réalisation. Dans notre pays,
l’interdiction formelle de l’esclavage comporte bien moins de lacunes que sa non application ; c’est d’un tel manquement qu’il s’agit, contrairement à la thèse induite des circonvolutions dilatoires du Président du CMJD. Ce dernier est régulièrement saisi, par les militants des droits de l’homme, des cas extrêmes où les autorités refusent de faire triompher le droit contre des maîtres, tous arabo-berbères, auteurs de travaux forcés, de captation d’héritage, de séquestrations de mineurs, voire de traite, excès commis contre d’autres mauritaniens, d’extraction servile. A cet égard, le Colonel Ely Ould Mohamed Vall dispose, par nos soins, d’une documentation détaillée et régulièrement mise à
  jour.

 

- Confirme que le Président du CMJD a reçu, durant les deux semaines antérieures à son déplacement vers l’Europe, des notables tribaux de toutes nos ethnies, afin de les pousser, explicitement, à quitter les partis reconnus, pour s’organiser en listes indépendantes, aux scrutins législatif et municipal. La démarche a été répétée mainte fois et le nombre des témoins directs
n’autorise aucun doute sur le crédit de l’accusation de partialité.

 

Enfin, S.O.S.-Esclaves attire l’attention du Conseil Militaire et du Gouvernement, ainsi que
l’ensemble des société politique et civile de Mauritanie, sur les périls nés d’une telle conduite. La mise en garde s’étend, également et par les mêmes alarmes, aux partenaires extérieurs, notamment l’Union Africaine, l’Exécutif de l’Europe et les Etats-Unis d’Amérique. Dans le contexte d’une sortie pénible de l’autoritarisme, il est exclu, que l’atteinte aux promesses de transition contribue à une stabilité durable en Mauritanie.

 

Bouabacar Messoud, Président de S.O.S.-Esclaves

                                                                                                        Nouakchott, le  30 septembre 2006

 

 

 

 

 

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