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TEMOIGNAGE 149 :

 

A.H.M.E.

 

 

IRA-Mauritanie: Mise au point sur le manifeste des Hratin



INITAIATIVE POUR LA RESURGENCE DU MOUVEMENT ABOLITIONNISTE

                                                     

Mise au point sur le manifeste des Hratin


Depuis sa création Initiative pour la résurgence du mouvement abolitionniste (IRA) a adopté une méthode nouvelle et authentique de lutte, fondée sur la transparence dans l'expression de ses positions. Son combat a pour objectif la fondation d'un Etat de droit et l’édification d'une société  d'égalité et de justice. IRA a démontré sa détermination à lutter contre le système tribal et ses organes de contrainte, à la fois symboliques et matériels, par l’usage de la critique objective. Notre organisation a appris aux mauritaniens, l’écoute de  la vérité morale d’où, désormais, certains troubles d’audition et de motricité dans l’ensemble du corps social.

Notre modèle de lutte s'est avéré efficace du point de vue des résultats ; en un peu de temps. IRA a été attentive aux appels venant des groupes de Hratin habitués à  la clandestinité et aux manœuvres velléitaires, en  dépit de leur implication, avec nous,  dans quelques-uns des objectifs et des principes. Notre acceptation du travail avec ces groupes s'est traduite par la participation, avec d’autres partenaires de la gauche réformiste, à la conception puis la rédaction d’un document  commun, dans le but de réaliser un diagnostic de la problématique Hratin, suivi des perspectives concrètes de leur émancipation.  Il s’agissait de poser les germes d'une coordination, avec toutes les parties qui partagent la conviction, afin de lever l'injustice et l'iniquité contre les élites et les masses d'esclaves et anciens esclaves en Mauritanie.

Justement, à cause du caractère confidentiel des réunions et délibérations, autour du document proposé, nous avons été surpris par la « fuite »  du texte vers les media conservateurs dont l’hostilité à la cause s’expose sans vergogne.  La circulation du projet, au sein des directions  de partis politiqués et jusque dans les services de sécurité a révélé la divulgation de toutes les versions réactualisées. L’indignation succéda à l’étonnement, lorsque nous avons appris combien d’efforts certains membres de cette initiative consentent-ils pour coordonner avec les traitres même à la cause Hratin, depuis des années identifiés comme tels, auprès des pouvoirs mauritaniens ; parmi ladite engeance, nourrie à la sève de la délation et du retournement de veste, nous avons pu identifier des éléments des renseignements qui opéraient récemment à Genève et à Nouakchott, en utilisant des titres fictifs, des identités modelables, sous le profil éculé de la prétendue et fameuse « lutte contre l'extrémisme Hratin ».

Pour toutes ces raisons, IRA, qui avait exprimé, à huis clos, l’adoption du contenu du document, vient, par la présente mise au point, mettre un terme aux suspicions autour de la divulgation du texte ; dans le but de couper court aux manipulations et manœuvres d’infiltration obliques, notre organisation engage tous les partenaires impliqués depuis le début, à publier leur position et de se dévoiler, avec courage.

Aussi, au nom de personnes vulnérables, des militants sans défense, des volontaires anonymes, nous récusons, maintenant, la poursuite des réunions clandestines et appelons, le reste des groupes et les individus à afficher leur point de vue, en guise de respect pour la lutte nationale d’émancipation démocratique.
Nouakchott le 16 Janvier

La commission de communication

Ci-joint le document en question, bonne lecture
 
récalcitrant


                     RÉPUBLIQUE ISLAMIQUE DE MAURITANIE


 Honneur-Fraternité-Justice

 

DECLARATION

pour la Mauritanie de demain, égalitaire, unie et réconciliée avec elle-même

 Octobre 2012


La Question Haratine : l’interminable exclusion


Après plus d’un demi-siècle d’indépendance, la Mauritanie, pays multiethnique et multiculturel par excellence, demeure plus que jamais confrontée au défi de la mise en place d’un véritable contrat social  fondé sur  l’appartenance commune à une Nation Unifiée.

Toute l’histoire du pays témoigne d’une constante exclusion politique, économique et sociale d’une partie de plus en plus significative de la population et ce sur la base de son origine.

Les Haratines, esclaves ou abid  et anciens esclaves ou leurs descendants, sont confrontés, davantage que n’importe quelle autre catégorie socio-ethnique, à l’injustice au quotidien, au manque de perspectives et de débouchés, sans compter  les pratiques récurrentes de l’état mauritanien moderne, pour les maintenir dans la condition servile de citoyens de seconde zone.    

Sur le plan symbolique, la stigmatisation est absolue : le sort des haratines est à ce point si peu enviable qu’une partie de leur communauté peine à assumer son appartenance et son statut pour le revendiquer avec la fierté requise.

Casser le cercle vicieux de cette condescendance teinté de dédain, ayant conduit à cette mise à l’écart programmée, ne peut se concevoir que par une refondation de la république sur la base d’un réel partage du pouvoir et des ressources du pays entre l’ensemble de ses fils. Une telle option s’impose - plus que jamais - comme l’unique voie de salut pour mettre un terme à cette sempiternelle injustice, générée par une histoire séculaire mais, hélas, toujours inaltérée.

                                                                                

      Dans la vie de tous les jours, la marginalisation des haratines est à la fois évidente et systématique. Elle se traduit aussi bien en termes de liberté individuelle et d’autonomie collective, qu’en déficits d’accès à l’éducation, aux services sociaux de base et encore plus  aux richesses nationales ou au pouvoir politique. La condition générale de cette communauté demeure marquée par l’esclavage et ses séquelles : l’exclusion et la pauvreté y prévalent; dans l’indifférence totale des pouvoirs publics.                                                                                                             

De même, la survivance de l’esclavage traditionnel est restée une réalité massive dans la Mauritanie postcoloniale et le demeure encore aujourd’hui, en dépit des dénégations officielles et officieuses. Certes, les différents régimes politiques du pays ont constamment adopté des attitudes ambiguës mêlant le déni, l’embarras et le laisser-faire avant qu’en 2007, le gouvernement mauritanien consente, de bien mauvaise grâce, et sous la pression du collectif des victimes, à adopter un cadre juridique de pénalisation qui, malgré ses nombreuses insuffisances, est tout de même théoriquement abolitionniste mais en pratique largement inappliqué. La mauvaise foi du gouvernement a été très vite mise en valeur par les nombreuses altercations et violences verbales qui ont émaillé toutes les réunions ayant  rassemblé les organisations de la société civile avec la commission ministérielle chargée, pourtant, d’expliquer la dite loi.  


Parallèlement à ces timides avancées, de nouvelles formes d’exclusion et d’esclavage modernes ont vu le jour.                                                                                             

Tant de Haratines sont enkystés dans des poches de misère : ils occupent des Habitations de fortune, faites de bric-et-de-broc dans des enceintes disséminées au milieu des quartiers chics de Nouakchott où ils s’entassent les uns sur les autres dans la promiscuité la plus totale. Au sein des grandes cités, l’essentiel de cette communauté se concentre à la périphérie, dans les kebbas (Bidonvilles) et les quartiers pauvres où ils constituent l’essentiel de la population.      Pire encore est la situation de ceux qui restent à la campagne; la plupart d’entre eux vivent à portée de main de leurs anciens maîtres  dans des ghettos (Adwabas)  de brousse où règnent la pauvreté,  le désœuvrement et l’ignorance et beaucoup succombent à la délinquance quand ils quittent la campagne pour la ville.


Nonobstant la centralité grandissante du débat sur cette question vitale pour le devenir de la Mauritanie et les acquis symboliques du mouvement national de lutte contre l’esclavage, les conditions de vie des Haratines – qui connaissent une dégradation sans précédent - sonnent le glas de l’ordre établi dont l’essence inégalitaire et l’impossible  réforme conduiront inévitablement, à un moment ou un autre, à  l’implosion.

Sur le plan démographique, les haratines représentent pas moins de 45 % de la population du pays; ils continuent pourtant d’être, et de loin, la communauté la plus défavorisée politiquement, socialement et économiquement. Cette sujétion incomparable, avatar d’un asservissement multiséculaire, se perpétuer par la volonté d’un système né de l’injustice et survivant de l’inégalité. Cette inégalité de naissance, normée par des us et coutumes traditionnelles désuètes, s’est transformée en une inégalité des chances ou « malchance structurelle » par le truchement des régimes politiques successifs dont la plupart se sont évertués, insidieusement, à transposer et reproduire  la logique pyramidale de la tribu en lieu et place de la rationalité démocratique supposée de l’état moderne.

En effet, des dizaines d’années durant, l’arme de l’ignorance et de la marginalisation économique ont  été largement et abusivement utilisées contre cette communauté et leurs dégâts sont tels, qu’aujourd’hui, l’essentiel de ses membres sont réduits à être presque  les seuls à occuper, au degré de monopole, des emplois subalternes dans les activités urbaines et rurales. Les enfants  Haratines, privés de scolarité et réduits à ramasser les ordures ou peupler les rues des villes et même des petits hameaux, constituent une preuve irréfutable du caractère profondément injuste et discriminatoire des pouvoirs publics qui continuent de cautionner, là où s’impose une rupture radicale, la pire des injustices : celle de l’inégalité des chances dans l’éducation des enfants.

L’absence - très remarquée - des Haratines dans les filières d’emplois des secteurs publics et semi-publics est à mettre sur le compte des politiques délibérées d’un état, patrimoine exclusif de bandes de prévaricateurs communautairement très typés ; et de surcroît, continuellement assailli  de demandes pressantes de l’alliance militaro – tribale dont il est la chasse gardée.


Toute tentative d’émancipation se trouve compromise d’office et bien lourdement par le sabotage délibéré de l’école publique et l’obstruction à toute opportunité de réussite économique qui constitue la clé de voûte de toute promotion sociale. Ainsi, patiemment, de pillages en prébendes et  de contrats en prêts complaisants de banques et d’institutions publiques, s’est constitué, en toute impunité et au profit exclusif des seuls anciens maîtres, un capital privé national, résultat du détournement de la fonction politico-administrative, pendant un processus tri décennal. Dans le même temps, des agglomérations (adwabas et kebba) et des générations de centaines de milliers de Haratines sont maintenus hors du temps, dans le trou noir de l’ignorance et de l’iniquité. 

                                                                                                 

 Un tel état de fait n’est pas le fruit du hasard mais découle bien des choix délibérés et conscients de la part des tenants successifs du pouvoir dont la plupart s’avéraient incapables de saisir le sens du projet de nation ; en somme l’intérêt général, au point qu’ils ne semblent n’avoir comme ambitions pour ce pays que de sauvegarder la rigide règle de reproduction des privilèges d’un passé révolu. Règle qui a survécu à l’indépendance et s’est aggravée sous le règne des militaires.

L’accumulation des frustrations a eu pour résultat la différenciation galopante dans le tissu social de ce qui était connu, jadis, sous le label de « MAURES », en deux entités de plus en plus distinctes; différenciation qui est à inscrire dans la logique de cette bombe à retardement qu’on appelle injustice et dont l’histoire nous enseigne qu’elle explose toujours à l’improviste et sans crier gare. 

Partant du constat de cette  réalité exécrable qui ne fait honneur à personne, le système militaro-féodal qui use et abuse de tous les moyens étatiques pour pérenniser  une domination devenue impossible, est appelé à prendre conscience, aujourd’hui, que les victimes, jusqu’ici consentantes de l’état mauritanien moderne, sont parvenus au seuil de l’insupportable et en ont ras-le-bol de subir indéfiniment les affres d’un système irresponsable, sans foi ni loi.


L’objet du présent document est de faire un état des lieux de cette situation plus d’un demi-siècle après l’indépendance et d’oser des propositions pratiques pour corriger ce qui doit l’être dans les délais les plus rapides possibles sur la base des principes fondamentaux des droits de l’homme et du citoyen en vue de préserver la paix civile par le moyen unique de la justice. Les auteurs sont pleinement conscients de l’existence d’autres injustices qui frappent d’autres communautés et  segments de notre peuple, notamment les pauvres, quelle que soit leur origine, les castes considérées « inférieures », certaines franges des communautés négro-mauritaniennes, les femmes…etc. Ils ne conçoivent le règlement définitif de la « question Haratine » que dans le cadre d’un effort global sur la voie de l’égalité, de la rationalité, de la fin de l’impunité et de l’abrogation des privilèges tribaux qui ne profitent qu’à une infime minorité, aux dépens des intérêts de la collectivité nationale et même tribale.

                  

 L’états des lieux : des chaînes de l’esclavage aux barreaux de l’exclusion


Le  diagnostic de la situation passée et actuelle des haratines fait ressortir un tableau sombre, marqué par les ravages de l’esclavage, de la domination, de l’exclusion et de l’injustice. Le mal s’est perpétué sous la chape de plomb d’un ordre empreint d’archaïsmes et d’inaptitude à l’autocritique, finalement réfractaire à toute remise en question interne.

Loin des discours idéologiques ou partisans, un simple survol de quelques chiffres et indicateurs permet de donner la mesure exacte de cette triste réalité :

v  Plusieurs dizaines à plusieurs centaines de milliers de haratines (les estimations sont approximatives en l’absence d’études indépendantes du fait des tabous nés du refus systématique par les gouvernements successifs) sont encore réduits à l’abominable esclavage de naissance, de statut et de condition avec toutes les sujétions et les traitements inhumains et dégradants qui s’y attachent : travail forcé et non rémunéré, viols et exploitation sexuelle, séparation des familles, ignorance et pauvreté, misère sociale et économique, absence de perspectives d’avenir et exclusion…etc ;

v  Plus de 80% des 1 400 000 pauvres en Mauritanie sont issus de la communauté Haratine ;

v  Plus de 85 % des 1500 000 analphabètes en Mauritanie en sont membres;

v  Près de 90 % des petits paysans sans terre du fait de la tenure traditionnelle du sol ou de l’exploitation féodalo-esclavagiste, se recrutent au sein de ce groupe;

v  -Moins de 10 % des 30 000 hectares attribuées légalement et aménagés dans la vallée du fleuve ont profité aux petits paysans locaux, le reste à quelques dizaines de fonctionnaires, commerçants et hommes d’affaire souvent natifs des Wilayas non agricoles ;

v  -La parcelle d’un paysan local est en moyenne de 0,25 à 0,5 hectare contre une moyenne de 200 hectares pour la parcelle d’un fonctionnaire ou homme d’affaires agriculteur d’occasion;

v  -Moins de 10% des 2 à3 milliards d’UM de prêts accordés annuellement par le Crédit agricole pour financer la campagne éponyme, profitent aux milliers de cultivateurs  locaux (à majorité Haratines) contre plus de 90% pour les dizaines d’entrepreneurs de l’agro-business (ou prétendus tels), ressortissants de milieux et de zones  sans vocation agricole dans leur grande majorité;

v  - Moins de 0,1% des villas et habitations de haut standing des quartiers chics de Nouakchott appartiennent à des Haratines;

v  -Moins de dix diplômés  de cette communauté sur 200 ont profité du programme spécial d’insertion pour les diplômés chômeurs dans le secteur agricole au niveau de la plaine de  M’Pourié à Rosso ;

v  Plus de 90 % des dockers, domestiques, travailleurs manuels exerçant des métiers pénibles et mal rémunérés sont des Haratines ;

v  Plus de 80% des élèves de cette communauté n’achèvent pas le cycle primaire et moins de   5 % poursuivent jusqu’au bout du cycle secondaire ;

v  -Moins de 5 % des étudiants de l’enseignement supérieurs sont issus de cette communauté ; et une infime minorité de ce pourcentage perçoit des allocations d’études ;

v  Moins de 2 % des étudiants des grandes Ecoles nationales (ENAMJ, Ecole des Mines, Faculté de médecine, EMIA…etc) et étrangères sont issus de cette communauté ;

v  Moins de 1% des opérateurs économiques (hommes et femmes d’affaires importants) sont Haratines ;

v  Moins de 2% des hauts fonctionnaires et cadres supérieurs du secteur public et parapublic sont Haratines ;

v   Une simple dizaine de parlementaires sur 151 élus au niveau des deux chambres du parlement ;

v  Moins de 15 maires sur 216 et moins de 12 % de conseillers municipaux à l’échelle national;

v  2 Ministres en moyenne sur les 30 dernières années sur plus de 40 ministres et assimilés ; 20 ministres sur 600 de 1957 à 2012 ;

v  Un seul Faghih agrée sur plusieurs centaines ;

v  Quelques dizaines d’Imams sur des milliers reconnus et agrées ;

v  2 Secrétaires généraux de Ministères et Institutions assimilées sur 40 ;

v  1 wali(gouverneur de région) sur 13 ;

v  1à 2 hakems(préfet) sur 53 ;

v  1 à 2 Chefs de Mission diplomatique sur 35 environ ;

v  3 à 4 Directeurs généraux d’Etablissement ou de sociétés publics sur 130 ;

v  2 Présidentes de Conseils d’Administration  d’Etablissements ou sociétés publics sur 130 ;

v  Moins de 20 médecins sur 600 ;

v  Moins de 20 professeurs d’université sur plus de 300 ;

v  Moins de 5 magistrats sur plus de 200 ;

v  Moins de 20 ingénieurs sur plus de 200 ;

v  Une dizaine d’administrateurs civils sur plus de 200 ;

v  Moins de 7 diplomates sur 130 ;

v  2 ou trois commissaires de police sur plus de 150 ;

v  Une dizaine d’administrateurs civils sur plus de 200 ;

v  Moins de 30 officiers supérieurs sur plus de 500 ;

v  Aucun général parmi les 12 que compte le pays ;

v  Aucune banque parmi la dizaine d’établissements bancaires que compte le pays.


Le  tableau illustre à suffisance la marginalisation, voire l’exclusion des membres de cette communauté qui cumulent  tous les handicaps tant sociaux et culturels que politiques et économiques ; et font face, par-dessus le marché, à toute sorte d’obstacles et d’embuches, dressés devant leur promotion. Les rares cadres Haratines qui parviennent à se hisser au rang de l’élite nationale, atteignent très vite le plafond de verre et cessent, dès lors, de pouvoir prétendre à diriger les hautes sphères de l’état.

S’il est compréhensible que l’accès aux grands corps (médecins, magistrats, administrateurs ou ingénieurs) soit soumis à des critères académiques, il est difficilement justifiable que, pour les postes soumis à la discrétion du Gouvernement ou simplement de l’Administration, la préférence ethnique s’avère aussi plus massive et durable. D’autant plus que, chez nous, les critères de nomination aux fonctions gouvernementales et aux charges étatiques, relèvent presque toujours du fait du prince et rarement de la compétence ou du mérite. Pour s’en convaincre, prenez un échantillon des 130 directeurs et chefs d’établissements publics ou parapublics; vous trouverez que la plupart d’entre eux n’ont d’autre mérite que de bénéficier d’ententes tribales et /ou d’appartenir à des réseaux mafieux qui monopolisent les destinées du pays au détriment de l’intérêt supérieur de la nation, de la justice, de la cohésion et de l’unité nationales.  

Par ailleurs, comment comprendre que seuls 10 parlementaires sur 151  soient Haratines alors que le discours officiel ne cesse de ressasser le credo de la représentativité du peuple ?

Pourtant,  les 53 circonscriptions électorales (Moughata’a) d’où proviennent  les députés et sénateurs, comptent toutes une majorité - absolue ou relative - de Haratines.

Plus injuste est encore la situation du Gouvernement qui a exclu les descendants d’esclaves jusqu’en décembre 1984. Depuis, tous les pouvoirs qui se sont succédé, ont fixé le quota des Haratines à 2 ou 3 places au gouvernement sur plus de 40 ministres et assimilés. La disproportion est flagrante.

Ainsi, la Mauritanie devient le seul pays au monde où l’Etat a inventé la discrimination négative ; laquelle postule la fixation d’un quota plancher, figé et profondément injuste pour les communautés défavorisées alors que la discrimination positive, qui s’impose dans de tels cas, justifierait exactement d’une logique inverse.

Mais la situation la plus emblématique de l’exclusion des haratines demeure, sans conteste, celle des petits paysans sans terre, encore soumis à la domination et l’exploitation esclavagiste et féodale, souvent fondée sur le détournement de la réforme foncière de 1983 par des autorités administratives et des magistrats au nom d’une solidarité de classe, parfois de race, parée des oripeaux de  la légalité républicaine et parfois sous couvert de prescriptions religieuses.

Plus inquiétante encore est la faillite de l’école publique, jadis considérée comme le principal levier de promotion sociale et le meilleur instrument pour gommer les disparités matérielles et statutaires, en somme tendre vers l’égalité effective. Tous s’accordent, aujourd’hui, à penser qu’elle n’est plus en mesure de modifier en profondeur les rapports sociaux ou de former des citoyens éduqués, aptes à s’intégrer dans une nouvelle Mauritanie égalitaire et unie.

Cette faillite retentissante a créé une école à deux vitesses : une école privée pour les classes moyennes et/ou supérieures et les classes privilégiées et une école publique pour les enfants des couches défavorisées et populaires, très majoritairement composées des Haratines. Alors d’instrument de promotion sociale, l’enseignement est devenu une machine de reproduction- voire d’accentuation- de l’ordre social injuste et des inégalités existantes.

De fait, la situation d’esclavage persistante, la faillite du système éducatif et l’échec scolaire massif qui broient, dans l’indifférence  les enfants des Haratines et leur avenir, la difficile condition des masses paysannes et ouvrières, l’exclusion politique et économique, la marginalisation systématique de l’élite naissante, rendent urgent un Sursaut National, porté par un grand consensus social et politique pour refonder la République  et rebâtir ensemble un projet fédérateur pour le progrès, le développement et la justice.

Il est donc grand temps de lancer un grand Débat sur la question Haratine en vue de dresser un état des lieux rigoureux et exhaustif des formes de persistance de l’esclavage comme institution, comme condition et comme pratique; ensuite, il conviendrait d’explorer les formes d’exclusion politique, économique et sociale des Haratines dans tous les compartiments de la vie nationale ; enfin, il faudrait proposer des stratégies de lutte contre leur exclusion ainsi que les politiques et les instruments pratiques et adéquats susceptibles de mettre un terme à leur sujétion.


I-                   Propositions pour refonder la République : de l’exclusion programmée à l’égalité réelle


Le diagnostic ainsi réalisé conduit à formuler des recommandations dans les différents domaines en vue de corriger les injustices, déséquilibres et écarts relevés.

Les propositions qui suivent devraient constituer la trame de fond d’une stratégie de plaidoyer et d’action en faveur de la mise en place  de  politiques publiques et de programmes d’éradication véritable de l’esclavage et d’émancipation  des Haratines.

Un grand Débat public auquel seront associés tous les médias, les experts et personnalités qualifiées, les érudits et Fughahas, doit être organisé dans un proche avenir pour discuter et enrichir les propositions ci-dessous et leur donner le maximum de résonnance dans tous les milieux de la société

Une fois amendés et adoptés, les résultats et propositions de ce débat  pourraient constituer la base d’un Plan d’action gouvernemental, visant à lutter contre toutes les inégalités et discriminations et tendre résolument vers l’égalité réelle entre les communautés et les citoyens. Toutefois, cette orientation doit être spécifiquement orientée en faveur des haratines qui accusent un retard très important par rapport aux autres composantes nationales.         

L’approche de « discrimination positive » à laquelle de nombreuses voix ont déjà appelé, s’impose en urgence.


Les propositions concrètes sont les suivantes :


1-      Engager, dans les meilleurs délais, une large concertation nationale pour la mise en place d’un véritable contrat social  fondé sur  l’appartenance commune à une Nation Unifiée

2-      Réaliser une véritable réforme agraire de grande envergure menée suivant les principes connus : redistribution équitable, individualisée et définitive des terres selon le principe de préemption pour le travailleur du sol (la terre appartient à ceux qui la travaillent), sécurisation juridique de la propriété par des clauses de sauvegarde contre la spéculation, modernisation de l’outil de production, accroissement de l’investissement productif, mise en place de mécanismes garantissant une commercialisation rentable de la production..etc

3-      Mettre en application effective la Loi criminalisant l’esclavage et les pratiques induites par la révision ou le renforcement de certaines dispositions, la création d’un Structure publique chargée de ce dossier et de toutes les politiques publiques pour l’égalité réelle.

4-      La création d’un Fonds pour financer toutes les actions liées à ce projet, une revue annuelle de l’état de mise en œuvre de la Loi avec un débat public sur ce rapport et une publication largement médiatisée.

Une telle action à trois niveaux devrait viser à établir enfin la vérité sur la réalité de l’esclavage, définir un cadre d’action pour en éradiquer les pratiques et survivances, initier une politique répressive sans complaisance et accroître la lutte contre l’impunité par la conduite de procédures d’instruction et de jugement exemplaires, d’arrestation et de punition des contrevenants

5-      Mener une enquête quantitative et qualitative indépendante sous l’égide de l’Etat et avec la participation d’organisation spécialisées aux fins de mesurer la réalité exacte du phénomène de l’esclavage, de ses survivances et de ses séquelles.

6-      Initier un grand débat doctrinal associant les différentes écoles de pensée islamique sur le discours religieux et leur rapport à l’esclavage, contrôler la diffusion des ouvrages des jurisconsultes et certains programmes des médias officiels (Radio Coran par exemple) tendant à perpétuer l’esclavage et l’inégalité entre les hommes. Il convient aussi de s’interroger sur le rôle des Ulémas et Fughahas, en tant qu’instance de légitimation de tout  pouvoir politique en place et de l’ordre social injuste, jusqu’ici réfractaires aux enseignements éthiques de l’Islam, notamment les valeurs d’égalité, d’humanisme et de fraternité.

7-      Affirmer le leadership des membres qualifiés de la communauté Haratine dans le domaine religieux, culturel et symbolique avec l’émergence d’Imams et Fughahas, écrivains et penseurs, femmes et hommes des arts et médias, poètes et prosateurs pour modifier l’image et la perception de cette communauté et mettre en valeur sa contribution au système de production et de diffusion des valeurs religieuses et culturelles.

8-      Affirmer, de manière claire et précise, le principe d’égalité réelle entre les communautés et les citoyens dans les programmes d’enseignement publics et privés, les déclarations de politique générale du Gouvernement et de l’Opposition, les différents plans de développement, les priorités des Organisations de la société civile et des partenaires extérieurs ; un Projet de Charte pour l’égalité réelle et contre l’exclusion et les discriminations sera proposé très prochainement à tous les partis politiques pour l’enrichir et l’adopter,

9-      Créer des zones d’éducation préférentielle dans les espaces d’extrême pauvreté (adwabas) avec tous les avantages liés à ce statut en termes d’enseignement, d’infrastructures, de moyens budgétaires appropriés, d’encadrement et de suivi pédagogique, d’évaluation et de motivation des enseignants, des élèves et de leurs parents ; d’accès prioritaire et préférentiel aux bourses dans l’enseignement professionnel et supérieur, de création d’internats et de cantines scolaires…etc

10-  Mettre à l’étude la faisabilité de l’élargissement du Système de protection sociale pour tendre graduellement vers un régime d’assurance maladie universelle qui prend en compte la réalité actuelle caractérisée par le fait que plus de 80% de Mauritaniens et probablement près de 100% de pauvres et de travailleurs du secteurs informel se trouvent exclus de toute prise en charge du risque social et de santé;

11-  Revoir les règles de partage du pouvoir pour attribuer un quota stable de 40 % au minimum (de manière tacite ou solennelle) à la communauté haratine au niveau des Institutions constitutionnelles, du Gouvernement, des Administrations et Etablissement publics et des postes de hauts fonctionnaires de l’Etat (Cabinets Présidentiel et ministériel, Administration centrale et territoriale, Diplomatie, Projets de développement, Grands corps de l’Etat..etc) ;

12-  Instituer une règle imposant que les deux postes supérieurs du pouvoir exécutif (Président de la République et Premier Ministre) ne soient plus occupés par deux personnalités de la même communauté ; la mesure permettrait de mieux favoriser le partage du pouvoir.

13-  Etudier différentes formules pour instaurer une Législation fondée sur la discrimination positive dans certains domaines (Accès aux établissements et bourses d’enseignement, aux financements publics et investissements, aux fonctions publiques et mandats électifs…etc) à la lumière des expériences achevées ou non de certains pays confrontés à des défis similaires tels que (les Etats-Unis d’Amérique, l’Afrique du Sud, le Liban, l’Inde, le Brésil, le Royaume Uni…etc)

14-  Mettre en place des politiques assorties de mécanismes institutionnels, juridiques et budgétaires contraignants en vue de réaliser tous les objectifs liés à l’égalité réelle dans les différents domaines et assurer un suivi grâce à des mécanismes d’évaluation et des indicateurs chiffrés sous le contrôle du Parlement et des Organisations de la Société civile ;

15-  Encourager l’émergence d’une nouvelle classe d’opérateurs économiques et d’industriels de cette communauté en octroyant, dans des conditions préférentielles, des facilités pour la création d’établissements bancaires et financiers, de licences de pêche, des crédits et financements pour la création d’entreprises et d’industries dans des domaines porteurs, notamment la pêche et l’agriculture, pour mettre un terme à l’interminable exclusion des Haratines dans le domaine de l’économie et des affaires, élément le plus constant de leur oppression.

16-  Favoriser l’accès des haratines en tant que tels aux mandats électifs et à la haute administration par des moyens autres que les «quotas officieux» et ce pour en finir avec les discriminations flagrantes situant la part  qui leur revient à un niveau insignifiant : souvent entre 1 à 2% de Haratines dans des postes électifs et de hauts fonctionnaires alors que leur poids démographique est évalué à plus de 45 % de la population totale ;

17-  Inciter fortement à la présence d’un député Haratine au moins  dans toutes les circonscriptions électorales dont la représentativité parlementaire est supérieure ou égale à deux députés et ce compte tenu de leur majorité absolue ou relative dans l’ensemble des Moughata’a du pays.

18-  Refonder les politiques de lutte contre le chômage et la pauvreté avec un meilleur ciblage des zones de pauvreté et d’extrême vulnérabilité et l’application de mécanismes préférentiels en faveur des Haratines d’où l’intérêt de confier les politiques appropriées à l’Organisme public cité au point 4;

19-  Elaborer un programme spécial prioritaire en faveur des centaines de milliers de jeunes déscolarisés et sans diplôme, victimes de la faillite de l’école publique et de l’indigence de leurs parents ; les grands gisements d’emploi (Agriculture, Pêche, Mines, Services…) méritent une meilleure valorisation, en plus éventuellement d’un nouveau Service national civilo-militaire qui pourrait être  pourvoyeur de dizaines de milliers d’emplois ;

20-  Mettre en place des outils incitateurs (fiscaux, allégement de charges sociales, réduction des impôts sur les bénéfices, accès préférentiel aux financements bancaires avec des taux d’intérêt bonifiés…) pour mieux orienter l’investissement privé et accroître son volume vers les zones d’extrême pauvreté et favoriser la création de richesses et d’emplois ;

21-   Mettre en œuvre un Plan de formation professionnelle  au profit des petits métiers et des travailleurs du secteur informel avant de  leur ouvrir l’accès aux financements publics et privés permettant de mieux structurer leurs activités, en améliorer la productivité et en accroître les revenus ;

22-  Revoir le statut des sociétés d’intermédiaires (telles que le BEMOP) pour mettre fin à leurs scandaleuses pratiques relevant de l’esclavage moderne de prélèvement confiscatoire de plus de 60 % sur les salaires des travailleurs placés ; il convient, soit de les supprimer totalement et en confier la mission aux syndicats de travailleurs, soit  plafonner cette ponction à 10% maximum conformément aux standards internationaux ;

23-  Concevoir et mettre en œuvre un grand Programme de reconstitution du cheptel au profit de petits paysans et éleveurs pauvres pour les doter d’un bétail composé au minimum de 10 à 15 têtes de différentes familles (Ovins, caprins, bovins, camelins) selon les zones d’élevage et le choix des bénéficiaires. Ceci favorisera un élevage productif, susceptible d’accroître les revenus des haratines hors des villes et en réduire la misère;

24-  Promouvoir  une politique de logement social pour assurer l’accès des pauvres à la propriété et à un logement décent doté de l’eau et de l’électricité, avec une priorité aux demandeurs haratines;

25-  Appuyer les  Organisations de la société civile engagées dans le combat pour l’égalité réelle, l’appui à la création d’Instituts de réflexions stratégiques et de prospectives, d’Observatoires dédiés à développer la recherche, les études et les publications sur la problématique Haratine.

26-  Favoriser l’accès aux médias de tous les courants de pensée, des hommes politiques, intellectuels et militants de la cause de l’émancipation pour contrebalancer la pensée unique du courant nationaliste conservateur et négationniste qui refuse tout débat sur la réalité de l’esclavage et de l’exclusion dans le but de pérenniser l’ordre social injuste et inégalitaire au péril de l’unité et de la cohésion nationales.

27-   Faire de la journée correspondant à la date du vote de la Loi criminalisant les pratiques esclavagistes une Journée officielle de souvenir et de mémoire où la Nation rend hommage aux victimes de l’esclavage et célèbre par la production intellectuelle la plus variée les valeurs d’égalité, d’antiracisme, de solidarité et de fraternité. Il importe d’ organiser à cette occasion des cérémonies ponctuées de discours officiels, des débats dans les médias, les écoles et universités ; des remises de décorations et de reconnaissances aux militants de cette noble cause ;

28-  Créer une Haute Autorité indépendante, inscrite dans la Constitution, en charge de la promotion de l’égalité réelle et de la lutte contre les discriminations et l’exclusion , dotée de pouvoirs d’investigation, d’interpellation et du droit d’ester en justice pour  assister les personnes victimes de discrimination, de racisme ou d’esclavage.

Cette Haute Autorité pourrait également saisir le Gouvernement et les Autorités publiques  de tout manquement aux principes d’égalité et de traitement équitable des citoyens, quelles qu’en soient les causes.

Elle devrait établir un  rapport annuel soumis au Président de la République et aux Présidents du Sénat, de l’Assemblée nationale ainsi qu’au chef de file de l’opposition démocratique.

Ce rapport sera rendu public et alimentera un débat au niveau des deux chambres du parlement.

Partant du constat de cette sombre réalité, le présent Mémorandum constitue un appel à la refondation d’un nouveau projet politique national, tout entier tourné vers l’émancipation réelle de tous les marginalisés, à commencer par la communauté Haratine et l’éradication totale de toutes les formes d’injustice, d’exclusion et de domination dont souffrent tous nos concitoyens.

Plus particulièrement, la présente initiative a pour ambition de traduire une nouvelle prise de conscience  de la communauté Haratine pour capitaliser les acquis des luttes menées depuis la création du Mouvement El Hor en mars 1978, tirer les leçons de ces combats et concevoir un nouveau projet à la fois fédérateur et en rupture franche avec le système des hégémonies tribales.

Le grand mouvement civique que ce Mémorandum voudrait susciter et animer, s’inscrirait à contresens de l’ordre ancien, esclavagiste et féodal, pour créer les conditions d’une révolution sociale et politique portée par une forte mobilisation citoyenne, pacifique et démocratique, associant toutes les forces, issues de toutes nos communautés nationales et transcendant les appartenances partisanes de culture, d’opinion ou de couleur.

Ce document est une invitation pressante à s’adapter à la situation nouvelle et aux exigences de la réalité pour réaliser un apaisement entre les centres de pouvoir et la société et prévenir ainsi les effets délétères de l’insondable montée des frustrations  qui s’accumulent jour après jour

Il interpelle les forces politiques nationales (majorité présidentielle et opposition démocratique), les acteurs de la société civile, les leaders d’opinion ainsi que tout patriote mauritanien sincère pour leur demander, à tous, de se prononcer sur le contenu de ce modeste document.

En définitive, l’objectif premier d’une telle démarche n’est autre que de consolider la justice sociale, de consacrer l’égalité citoyenne et d’assurer l’unité nationale sur des bases saines, solides, viables et durables.



                                   DISPOSITIONS FINALES

LES PROMOTEURS DE CE MEMORANDUM SONT DES CADRES HARATINES APPARTENANT AUX DIFFERENTS PARTIS POLITIQUES DE LA MAJORITE ET DE L’OPPOSITION  AINSI QU’AUX ORGANISATIONS DE LA SOCIETE CIVILE.

TOUTES LES PERSONNES PHYSIQUES OU MORALES QUI ADHERENT A CE PROGRAMME PEUVENT SE JOINDRE AUX INITIATEURS DE CE MEMORANDUM  ET SIGNER UNE PETITION EN VUE DE LE PROMOUVOIR.

A COURT TERME, CE MANIFESTE DEVRAIT SERVIR POUR LA SENSIBILISATION, LE PLAIDOYER ET LA MOBILSATION POUR LA GRANDE MARCHE NATIONALE ET PACIFIQUE DITE MARCHE POUR LA JUSTICE ET L’EGALITE CITOYENNES.

SUR LE MOYEN TERME, CE MANIFESTE DEVRAIT ETRE DEBATTU, ENRICHI  ET VALIDE PAR LE PLUS GRAND NOMBRE DE CADRES, DE GROUPES ET D’ENTITES Y ADHERANT POUR QU’IL ACQUIERE LA FORCE ET LA LEGITIMITE NECSSAIRES POUR DEVENIR UN DOCUMENT DE BASE, SUSCEPTIBLE D’ETRE LE POINT D’ANCRAGE POUR L’OUVERTURE D’UNE NOUVELLE ERE POUR LA MAURITANIE

IL CONVIENT, PAR LA SUITE, DE LUI DONNER LE MAXIMUM DE RESONNANCE AU NIVEAU DE LA SOCIÉTÉ CIVILE, DE LA CLASSE POLITIQUE, DU GOUVERNEMENT ET DES CHANCELLERIES ÉTRANGÈRES.

CE MANIFESTE SERA RENDU PUBLIC A L’OCCASION DE CETTE GRANDE MARCHE, ENRICHI D’UNE DÉCLARATION POLITIQUE ET LARGEMENT DISTRIBUE EN MAURITANIE ET AU NIVEAU ARABE, AFRICAIN, EUROPÉEN, AMÉRICAIN ET INTERNATIONAL.

L’ACTION POUR ÉMANCIPATION DES HARATINES SERA FÉDÉRÉE AVEC L’ENSEMBLE DES EFFORTS ET DES LUTTES DESTINÉES A DÉFENDRE LES DROITS DE L’HOMME ET A ENRACINER LA DÉMOCRATIE, LA JUSTICE SOCIALE ET LA BONNE GOUVERNANCE AU PROFIT DE TOUS LES CITOYENS DE TOUTES LES COUCHES SOCIALES ET DE TOUS LES CITOYENS DE LA NATION.


 

 

 

REPUBLIQUE ISLAMIQUE DE MAURITANIE

Honneur – Fraternité - Justice

DECLARATION

pour la Mauritanie de demain, égalitaire, unie et réconciliée

avec elle-même


La Question Haratine : l’interminable exclusion

Après plus d’un demi-siècle d’indépendance, la Mauritanie, pays

multiethnique et multiculturel par excellence, demeure plus que jamais

confrontée au défi de la mise en place d’un véritable contrat social fondé sur

l’appartenance commune à une Nation Unifiée.

Toute l’histoire du pays témoigne d’une constante exclusion politique,

économique et sociale d’une partie de plus en plus significative de la population

et ce sur la base de son origine.

Les Haratines, esclaves ou abid et anciens esclaves ou leurs descendants,

sont confrontés, davantage que n’importe quelle autre catégorie socio-ethnique,

à l’injustice au quotidien, au manque de perspectives et de débouchés, sans

compter les pratiques récurrentes de l’état mauritanien moderne, pour les

maintenir dans la condition servile de citoyens de seconde zone.

Sur le plan symbolique, la stigmatisation est absolue : le sort des haratines

est à ce point si peu enviable qu’une partie de leur communauté peine à assumer

son appartenance et son statut pour le revendiquer avec la fierté requise.

Casser le cercle vicieux de cette condescendance teintée de dédain, ayant

conduit à cette mise à l’écart programmée, ne peut se concevoir que par une

refondation de la république sur la base d’un réel partage du pouvoir et des

ressources du pays entre l’ensemble de ses fils. Une telle option s’impose -plus

que jamais- comme l’unique voie de salut pour mettre un terme à cette

sempiternelle injustice, générée par une histoire séculaire mais, hélas, toujours

inaltérée.

Dans la vie de tous les jours, la marginalisation des haratines est à la fois

évidente et systématique. Elle se traduit aussi bien en termes de liberté

individuelle et d’autonomie collective, qu’en déficits d’accès à l’éducation, aux

services sociaux de base et encore plus aux richesses nationales ou au pouvoir

politique. La condition générale de cette communauté demeure marquée par

l’esclavage et ses séquelles : l’exclusion et la pauvreté y prévalent; dans

l’indifférence totale des pouvoirs publics.

De même, la survivance de l’esclavage traditionnel est restée une réalité

massive dans la Mauritanie postcoloniale et le demeure encore aujourd’hui, en

dépit des dénégations officielles et officieuses. Certes, les différents régimes

politiques du pays ont constamment adopté des attitudes ambiguës mêlant le

déni, l’embarras et le laisser-faire avant qu’en 2007, le gouvernement

mauritanien consente, de bien mauvaise grâce, et sous la pression du collectif

des victimes, à adopter un cadre juridique de pénalisation qui, malgré ses

nombreuses insuffisances, est tout de même théoriquement abolitionniste mais

en pratique largement inappliqué. La mauvaise foi du gouvernement a été très

vite mise en valeur par les nombreuses altercations et violences verbales qui ont

émaillé toutes les réunions ayant rassemblé les organisations de la société civile

avec la commission ministérielle chargée, pourtant, d’expliquer la dite loi.

Parallèlement à ces timides avancées, de nouvelles formes d’exclusion et

d’esclavage modernes ont vu le jour.

Tant de Haratines sont enkystés dans des poches de misère : ils occupent

des Habitations de fortune, faites de bric-et-de-broc dans des enceintes

disséminées au milieu des quartiers chics de Nouakchott où ils s’entassent les

uns sur les autres dans la promiscuité la plus totale. Au sein des grandes cités,

l’essentiel de cette communauté se concentre à la périphérie, dans les kebbas

(Bidonvilles) et les quartiers pauvres où ils constituent l’essentiel de la

population. Pire encore est la situation de ceux qui restent à la campagne; la

plupart d’entre eux vivent à portée de main de leurs anciens maîtres dans des

ghettos (Adwabas) de brousse où règnent la pauvreté, le désoeuvrement et

l’ignorance et beaucoup succombent à la délinquance quand ils quittent la

campagne pour la ville.

Nonobstant la centralité grandissante du débat sur cette question vitale

pour le devenir de la Mauritanie et les acquis symboliques du mouvement

national de lutte contre l’esclavage, les conditions de vie des Haratines – qui

connaissent une dégradation sans précédent - sonnent le glas de l’ordre établi

dont l’essence inégalitaire et l’impossible réforme conduiront inévitablement, à

un moment ou un autre, à l’implosion sociale.

Sur le plan démographique, les haratines représentent pas moins de 45 %

de la population du pays; ils continuent pourtant d’être, et de loin, la

communauté la plus défavorisée politiquement, socialement et économiquement.

Cette sujétion incomparable, avatar d’un asservissement multiséculaire, se

perpétuer par la volonté d’un système né de l’injustice et survivant de

l’inégalité. Cette inégalité de naissance, normée par des us et coutumes

traditionnelles surannées, s’est transformée en une inégalité des chances ou

« malchance structurelle » par le truchement des régimes politiques successifs

dont la plupart se sont évertués, insidieusement, à transposer et reproduire la

logique pyramidale de la tribu en lieu et place de la rationalité démocratique

supposée de l’état moderne.

En effet, des dizaines d’années durant, l’arme de l’ignorance et de la

marginalisation économique ont été largement et abusivement utilisées contre

cette communauté et leurs dégâts sont tels, qu’aujourd’hui, l’essentiel de ses

membres sont réduits à être presque les seuls à occuper, au degré de monopole,

des emplois subalternes dans les activités urbaines et rurales. Les enfants

Haratines, privés de scolarité et réduits à ramasser les ordures ou peupler les

rues des villes et même des petits hameaux, constituent une preuve irréfutable

du caractère profondément injuste et discriminatoire des pouvoirs publics qui

continuent de cautionner, là où s’impose une rupture radicale, la pire des

injustices : celle de l’inégalité des chances dans l’éducation des enfants.

L’absence - très remarquée - des Haratines dans les filières d’emplois des

secteurs publics et semi-publics est à mettre sur le compte des politiques

délibérées d’un état, patrimoine exclusif de bandes de prévaricateurs

communautairement très typés ; et de surcroît, continuellement assailli de

demandes pressantes de l’alliance militaro – tribale dont il est la chasse gardée.

Toute tentative d’émancipation se trouve compromise d’office et bien

lourdement par le sabotage délibéré de l’école publique et l’obstruction faite à

toute opportunité de réussite économique qui constitue la clé de voûte de toute

promotion sociale. Ainsi, patiemment, de pillages en détournements de deniers

publics et de contrats en prêts complaisants de banques et d’institutions

étatiques, s’est constitué, en toute impunité et au profit exclusif des seuls anciens

maîtres, un capital privé national, résultat du détournement de la fonction

politico-administrative, pendant un processus tri décennal. Dans le même temps,

des agglomérations (adwabas et kebba) et des générations de centaines de

milliers de Haratines sont maintenus hors du temps, dans le trou noir de

l’ignorance et de l’iniquité.

Un tel état de fait n’est pas le fruit du hasard mais découle bien des choix

délibérés et conscients de la part des tenants successifs du pouvoir dont la

plupart s’avéraient incapables de saisir le sens du projet de nation ; en somme

l’intérêt général, au point qu’ils ne semblent avoir comme ambitions pour ce

pays que de sauvegarder la rigide règle de reproduction des privilèges d’un

passé révolu. Règle qui a survécu à l’indépendance et s’est aggravée sous le

règne des militaires.

L’accumulation des frustrations a eu pour résultat la différenciation

galopante dans le tissu social de ce qui était connu, jadis, sous le label de

« MAURES », en deux entités de plus en plus distinctes (Bidhanes et Haratines);

différenciation qui est à inscrire dans la logique de cette bombe à retardement

qu’on appelle injustice et dont l’histoire nous enseigne qu’elle explose toujours

à l’improviste et sans crier gare.

Partant du constat de cette réalité exécrable, qui ne fait honneur à

personne, le système militaro-féodal qui use et abuse de tous les moyens

étatiques pour pérenniser une domination devenue impossible, est appelé à

prendre conscience, aujourd’hui, que les victimes, jusqu’ici consentantes de

l’état mauritanien moderne, sont parvenus au seuil de l’insupportable et en ont

ras-le-bol de subir indéfiniment les affres d’un système irresponsable, sans foi ni

loi.

L’objet du présent document est de faire un état des lieux de cette

situation plus d’un demi-siècle après l’indépendance et d’oser des propositions

pratiques pour corriger ce qui doit l’être dans les délais les plus rapides possibles

sur la base des principes fondamentaux des droits de l’homme et du citoyen en

vue de préserver la paix civile par le moyen unique de la justice. Les auteurs

sont pleinement conscients de l’existence d’autres injustices qui frappent

d’autres communautés et segments de notre peuple, notamment les pauvres,

quelle que soit leur origine, les castes considérées « inférieures » -

particulièrement les forgerons-, certaines franges des communautés négromauritaniennes,

les femmes…etc. Ils ne conçoivent le règlement définitif de la

« question Haratine » que dans le cadre d’un effort global sur la voie de

l’égalité, de la rationalité, de la fin de l’impunité et de l’abrogation des

privilèges tribaux qui ne profitent qu’à une infime minorité, aux dépens des

intérêts de la collectivité nationale et même tribale.

L’états des lieux :

des chaînes de l’esclavage aux barreaux de l’exclusion

Le diagnostic de la situation passée et actuelle des haratines fait ressortir

un tableau sombre, marqué par les ravages de l’esclavage, de la domination, de

l’exclusion et de l’injustice. Le mal s’est perpétué sous la chape de plomb d’un

ordre empreint d’archaïsmes et d’inaptitude à l’autocritique, finalement

réfractaire à toute remise en question interne.

Loin des discours idéologiques ou partisans, un simple survol de quelques

chiffres et indicateurs permet de donner la mesure exacte de cette triste réalité :

v Plusieurs dizaines à plusieurs centaines de milliers de haratines (les

estimations sont approximatives en l’absence d’études indépendantes du

fait des tabous nés du refus systématique par les gouvernements

successifs) sont encore réduits à l’abominable esclavage de naissance, de

statut et de condition avec toutes les sujétions et les traitements inhumains

et dégradants qui s’y attachent : travail forcé et non rémunéré, viols et

exploitation sexuelle, séparation des familles, ignorance et pauvreté,

misère sociale et économique, absence de perspectives d’avenir et

exclusion…etc ;

v Plus de 80% des 1 400 000 pauvres en Mauritanie sont issus de la

communauté Haratine ;

v Plus de 85 % des 1500 000 analphabètes en Mauritanie en sont membres;

v Près de 90 % des petits paysans sans terre du fait de la tenure

traditionnelle du sol ou de l’exploitation féodalo-esclavagiste, se recrutent

au sein de ce groupe;

v Moins de 10 % des 30 000 hectares attribuées légalement et aménagés

dans la vallée du fleuve ont profité aux petits paysans locaux, le reste à

quelques dizaines de fonctionnaires, commerçants et hommes d’affaire

souvent natifs des Wilayas non agricoles ;

v La parcelle d’un paysan local est en moyenne de 0,25 à 0,5 hectare contre

une moyenne de 200 hectares pour la parcelle d’un fonctionnaire ou

homme d’affaires agriculteur d’occasion;

v Moins de 10% des 2 à3 milliards d’UM de prêts accordés annuellement

par le Crédit agricole pour financer la campagne éponyme, profitent aux

milliers de cultivateurs locaux (à majorité Haratines) contre plus de 90%

pour les dizaines d’entrepreneurs de l’agro-business (ou prétendus tels),

ressortissants de milieux et de zones sans vocation agricole dans leur

grande majorité;

v Moins de 0,1% des villas et habitations de haut standing des quartiers

chics de Nouakchott appartiennent à des Haratines;

v Moins de dix diplômés de cette communauté sur 200 ont profité du

programme spécial d’insertion pour les diplômés chômeurs dans le

secteur agricole au niveau de la plaine de M’Pourié à Rosso ;

v Plus de 90 % des dockers, domestiques, travailleurs manuels exerçant des

métiers pénibles et mal rémunérés sont des Haratines ;

v Plus de 80% des élèves de cette communauté n’achèvent pas le cycle

primaire et moins de 5 % poursuivent jusqu’au bout du cycle secondaire ;

v Moins de 5 % des étudiants de l’enseignement supérieurs sont issus de

cette communauté ; et une infime minorité de ce pourcentage perçoit des

allocations d’études ;

v Moins de 2 % des étudiants des grandes Ecoles nationales (ENAMJ,

Ecole des Mines, Faculté de médecine, EMIA…etc) et étrangères sont

issus de cette communauté ;

v Moins de 1% des opérateurs économiques (hommes et femmes d’affaires

importants) sont Haratines ;

v Moins de 2% des hauts fonctionnaires et cadres supérieurs du secteur

public et parapublic sont Haratines ;

v Une simple dizaine de parlementaires sur 151 élus au niveau des deux

chambres du parlement ;

v Moins de 15 maires sur 216 et moins de 12 % de conseillers municipaux à

l’échelle national;

v 2 Ministres en moyenne sur les 30 dernières années sur plus de 40

ministres et assimilés ; 20 ministres sur 600 de 1957 à 2012 ;

v Un seul Faghih agrée sur plusieurs centaines ;

v Quelques dizaines d’Imams sur des milliers reconnus et agrées ;

v 2 Secrétaires généraux de Ministères et Institutions assimilées sur 40 ;

v 1 wali (gouverneur de région) sur 13 ;

v 1à 2 hakems (préfet) sur 53 ;

v 1 à 2 Chefs de Mission diplomatique sur 35 environ ;

v 3 à 4 Directeurs généraux d’Etablissement ou de sociétés publics sur 130 ;

v 2 Présidentes de Conseils d’Administration d’Etablissements ou sociétés

publics sur 130 ;

v Moins de 20 médecins sur 600 ;

v Moins de 20 professeurs d’université sur plus de 300 ;

v Moins de 5 magistrats sur plus de 200 ;

v Moins de 20 ingénieurs sur plus de 200 ;

v Une dizaine d’administrateurs civils sur plus de 200 ;

v Moins de 7 diplomates sur 130 ;

v 2 ou trois commissaires de police sur plus de 150 ;

v Une dizaine d’administrateurs civils sur plus de 200 ;

v Moins de 30 officiers supérieurs sur plus de 500 ;

v Aucun général parmi les 12 que compte le pays ;

v Aucune banque parmi la dizaine d’établissements bancaires que compte le pays.

Le tableau illustre à suffisance la marginalisation, voire l’exclusion des

membres de cette communauté qui cumulent tous les handicaps tant sociaux

et culturels que politiques et économiques ; et font face, par-dessus le

marché, à toute sorte d’obstacles et d’embuches, dressés devant leur

promotion. Les rares cadres Haratines qui parviennent à se hisser au rang de

l’élite nationale, atteignent très vite le plafond de verre et cessent, dès lors, de

pouvoir prétendre à diriger les hautes sphères de l’état.

S’il est compréhensible que l’accès aux grands corps (médecins,

magistrats, administrateurs ou ingénieurs) soit soumis à des critères

académiques, il est difficilement justifiable que, pour les postes soumis à la

discrétion du Gouvernement ou simplement de l’Administration, la

préférence ethnique s’avère aussi plus massive et durable. D’autant plus que,

chez nous, les critères de nomination aux fonctions gouvernementales et aux

charges étatiques, relèvent presque toujours du fait du prince et rarement de

la compétence ou du mérite. Pour s’en convaincre, prenez un échantillon des

130 directeurs et chefs d’établissements publics ou parapublics; vous

trouverez que la plupart d’entre eux n’ont d’autre mérite que de bénéficier

d’ententes tribales et /ou d’appartenir à des réseaux mafieux qui

monopolisent les destinées du pays au détriment de l’intérêt supérieur de la

nation, de la justice, de la cohésion et de l’unité nationales.

Par ailleurs, comment comprendre que seuls 10 parlementaires sur 151

soient Haratines alors que le discours officiel ne cesse de ressasser le credo

de la représentativité du peuple ?

Pourtant, les 53 circonscriptions électorales (Moughata’a) d’où

proviennent les députés et sénateurs, comptent toutes une majorité - absolue

ou relative - de Haratines.

Plus injuste est encore la situation du Gouvernement qui a exclu les

descendants d’esclaves jusqu’en décembre 1984. Depuis, tous les pouvoirs

qui se sont succédé, ont fixé le quota des Haratines à 2 ou 3 places au

gouvernement sur plus de 40 ministres et assimilés. La disproportion est

flagrante.

Ainsi, la Mauritanie devient le seul pays au monde où l’Etat a inventé la

discrimination négative ; laquelle postule la fixation d’un quota plancher,

figé et profondément injuste pour les communautés défavorisées alors que la

discrimination positive, qui s’impose dans de tels cas, justifierait exactement

d’une logique inverse.

Mais la situation la plus emblématique de l’exclusion des haratines

demeure, sans conteste, celle des petits paysans sans terre, encore soumis à la

domination et l’exploitation esclavagiste et féodale, souvent fondée sur le

détournement de la réforme foncière de 1983 par des autorités

administratives et des magistrats au nom d’une solidarité de classe, parfois de

race, parée des oripeaux de la légalité républicaine et parfois sous couvert de

prescriptions religieuses.

Plus inquiétante encore est la faillite de l’école publique, jadis considérée

comme le principal levier de promotion sociale et le meilleur instrument pour

gommer les disparités matérielles et statutaires, en somme tendre vers

l’égalité effective. Tous s’accordent, aujourd’hui, à penser qu’elle n’est plus

en mesure de modifier en profondeur les rapports sociaux ou de former des

citoyens éduqués, aptes à s’intégrer dans une nouvelle Mauritanie égalitaire

et unie.

Cette faillite retentissante a créé une école à deux vitesses : une école

privée pour les classes moyennes et/ou supérieures et les classes privilégiées

et une école publique pour les enfants des couches défavorisées et populaires,

très majoritairement composées des Haratines. Alors d’instrument de

promotion sociale, l’enseignement est devenu une machine de reproductionvoire

d’accentuation- de l’ordre social injuste et des inégalités existantes.

De fait, la situation d’esclavage persistante, la faillite du système éducatif

et l’échec scolaire massif qui broient, dans l’indifférence les enfants des

Haratines et leur avenir, la difficile condition des masses paysannes et

ouvrières, l’exclusion politique et économique, la marginalisation

systématique de l’élite naissante, rendent urgent un Sursaut National, porté par un grand consensus social et politique pour refonder la République et

rebâtir ensemble un projet fédérateur pour le progrès, le développement et la

justice.

Il est donc grand temps de lancer un grand Débat sur la question Haratine

en vue de dresser un état des lieux rigoureux et exhaustif des formes de

persistance de l’esclavage comme institution, comme condition et comme

pratique; ensuite, il conviendrait d’explorer les formes d’exclusion politique,

économique et sociale des Haratines dans tous les compartiments de la vie

nationale ; enfin, il faudrait proposer des stratégies de lutte contre leur

exclusion ainsi que les politiques et les instruments pratiques et adéquats

susceptibles de mettre un terme à leur sujétion.

I - Propositions pour refonder la République :

de l’exclusion programmée à l’égalité réelle

Le diagnostic ainsi réalisé conduit à formuler des recommandations dans les

différents domaines en vue de corriger les injustices, déséquilibres et écarts

relevés.

Les propositions qui suivent devraient constituer la trame de fond d’une

stratégie de plaidoyer et d’action en faveur de la mise en place de politiques

publiques et de programmes d’éradication véritable de l’esclavage et

d’émancipation des Haratines.

Un grand Débat public auquel seront associés tous les médias, les experts et

personnalités qualifiées, les érudits et Fughahas, doit être organisé dans un

proche avenir pour discuter et enrichir les propositions ci-dessous et leur donner

le maximum de résonnance dans tous les milieux de la société

Une fois amendés et adoptés, les résultats et propositions de ce débat

pourraient constituer la base d’un Plan d’action gouvernemental, visant à lutter

contre toutes les inégalités et discriminations et tendre résolument vers l’égalité

réelle entre les communautés et les citoyens. Toutefois, cette orientation doit

être spécifiquement orientée en faveur des haratines qui accusent un retard très

important par rapport aux autres composantes nationales.

L’approche de « discrimination positive» à laquelle de nombreuses voix ont

déjà appelé, s’impose en urgence.

Les propositions concrètes sont les suivantes :

1- Engager, dans les meilleurs délais, une large concertation nationale pour la

mise en place d’un véritable contrat social fondé sur l’appartenance

commune à une Nation Unifiée

2- Réaliser une véritable réforme agraire de grande envergure menée suivant

les principes connus : redistribution équitable, individualisée et définitive

des terres selon le principe de préemption pour le travailleur du sol (la terre

appartient à ceux qui la travaillent), sécurisation juridique de la propriété

par des clauses de sauvegarde contre la spéculation, modernisation de l’outil

de production, accroissement de l’investissement productif, mise en place

de mécanismes garantissant une commercialisation rentable de la

production..etc

3- Mettre en application effective la Loi criminalisant l’esclavage et les

pratiques induites par la révision ou le renforcement de certaines

dispositions, la création d’un Structure publique chargée de ce dossier et de

toutes les politiques publiques pour l’égalité réelle.

4- La création d’un Fonds pour financer toutes les actions liées à ce projet, une

revue annuelle de l’état de mise en oeuvre de la Loi avec un débat public sur

ce rapport et une publication largement médiatisée.

Une telle action à trois niveaux devrait viser à établir enfin la vérité sur la

réalité de l’esclavage, définir un cadre d’action pour en éradiquer les

pratiques et survivances, initier une politique répressive sans complaisance

et accroître la lutte contre l’impunité par la conduite de procédures

d’instruction et de jugement exemplaires, d’arrestation et de punition des

contrevenants

5- Mener une enquête quantitative et qualitative indépendante sous l’égide de

l’Etat et avec la participation d’organisation spécialisées aux fins de

mesurer la réalité exacte du phénomène de l’esclavage, de ses survivances

et de ses séquelles.

6- Initier un grand débat doctrinal associant les différentes écoles de pensée

islamique sur le discours religieux et leur rapport à l’esclavage, contrôler la

diffusion des ouvrages des jurisconsultes et certains programmes des

médias officiels (Radio Coran par exemple) tendant à perpétuer l’esclavage

et l’inégalité entre les hommes. Il convient aussi de s’interroger sur le rôle

des Ulémas et Fughahas, en tant qu’instance de légitimation de tout pouvoir

politique en place et de l’ordre social injuste, jusqu’ici réfractaires aux

enseignements éthiques de l’Islam, notamment les valeurs d’égalité,

d’humanisme et de fraternité.

7- Affirmer le leadership des membres qualifiés de la communauté Haratine

dans le domaine religieux, culturel et symbolique avec l’émergence

d’Imams et Fughahas, écrivains et penseurs, femmes et hommes des arts et

médias, poètes et prosateurs pour modifier l’image et la perception de cette

communauté et mettre en valeur sa contribution au système de production et

de diffusion des valeurs religieuses et culturelles.

8- Affirmer, de manière claire et précise, le principe d’égalité réelle entre les

communautés et les citoyens dans les programmes d’enseignement publics

et privés, les déclarations de politique générale du Gouvernement et de

l’Opposition, les différents plans de développement, les priorités des

Organisations de la société civile et des partenaires extérieurs ; un Projet de

Charte pour l’égalité réelle et contre l’exclusion et les discriminations sera

proposé très prochainement à tous les partis politiques pour l’enrichir et

l’adopter,

9- Créer des zones d’éducation préférentielle dans les espaces d’extrême

pauvreté (adwabas) avec tous les avantages liés à ce statut en termes

d’enseignement, d’infrastructures, de moyens budgétaires appropriés,

d’encadrement et de suivi pédagogique, d’évaluation et de motivation des

enseignants, des élèves et de leurs parents ; d’accès prioritaire et préférentiel

aux bourses dans l’enseignement professionnel et supérieur, de création

d’internats et de cantines scolaires…etc

10- Mettre à l’étude la faisabilité de l’élargissement du Système de protection

sociale pour tendre graduellement vers un régime d’assurance maladie

universelle qui prend en compte la réalité actuelle caractérisée par le fait

que plus de 80% de Mauritaniens et probablement près de 100% de pauvres

et de travailleurs du secteurs informel se trouvent exclus de toute prise en

charge du risque social et de santé;

11- Revoir les règles de partage du pouvoir pour attribuer un quota stable de

40 % au minimum (de manière tacite ou solennelle) à la communauté

haratine au niveau des Institutions constitutionnelles, du Gouvernement, des

Administrations et Etablissement publics et des postes de hauts

fonctionnaires de l’Etat (Cabinets Présidentiel et ministériel, Administration

centrale et territoriale, Diplomatie, Projets de développement, Grands corps

de l’Etat..etc) ;

12- Instituer une règle imposant que les deux postes supérieurs du pouvoir

exécutif (Président de la République et Premier Ministre) ne soient plus

occupés par deux personnalités de la même communauté ; la mesure

permettrait de mieux favoriser le partage du pouvoir.

13- Etudier différentes formules pour instaurer une Législation fondée sur la

discrimination positive dans certains domaines (Accès aux établissements et

bourses d’enseignement, aux financements publics et investissements, aux

fonctions publiques et mandats électifs…etc) à la lumière des expériences

achevées ou non de certains pays confrontés à des défis similaires tels que

 (les Etats-Unis d’Amérique, l’Afrique du Sud, le Liban, l’Inde, le Brésil, le

Royaume Uni…etc)

14- Mettre en place des politiques assorties de mécanismes institutionnels,

juridiques et budgétaires contraignants en vue de réaliser tous les objectifs

liés à l’égalité réelle dans les différents domaines et assurer un suivi grâce à

des mécanismes d’évaluation et des indicateurs chiffrés sous le contrôle du

Parlement et des Organisations de la Société civile ;

15- Encourager l’émergence d’une nouvelle classe d’opérateurs économiques

et d’industriels de cette communauté en octroyant, dans des conditions

préférentielles, des facilités pour la création d’établissements bancaires et

financiers, de licences de pêche, des crédits et financements pour la création

d’entreprises et d’industries dans des domaines porteurs, notamment la

pêche et l’agriculture, pour mettre un terme à l’interminable exclusion des

Haratines dans le domaine de l’économie et des affaires, élément le plus

constant de leur oppression.

16- Favoriser l’accès des haratines en tant que tels aux mandats électifs et à la

haute administration par des moyens autres que les «quotas officieux» et ce

pour en finir avec les discriminations flagrantes situant la part qui leur

revient à un niveau insignifiant : souvent entre 1 à 2% de Haratines dans des

postes électifs et de hauts fonctionnaires alors que leur poids

démographique est évalué à plus de 45 % de la population totale ;

17- Inciter fortement à la présence d’un député Haratine au moins dans toutes

les circonscriptions électorales dont la représentativité parlementaire est

supérieure ou égale à deux députés et ce compte tenu de leur majorité

absolue ou relative dans l’ensemble des Moughata’a du pays.

18- Refonder les politiques de lutte contre le chômage et la pauvreté avec un

meilleur ciblage des zones de pauvreté et d’extrême vulnérabilité et

l’application de mécanismes préférentiels en faveur des Haratines d’où

l’intérêt de confier les politiques appropriées à l’Organisme public cité au

point 4;

19- Elaborer un programme spécial prioritaire en faveur des centaines de

milliers de jeunes déscolarisés et sans diplôme, victimes de la faillite de

l’école publique et de l’indigence de leurs parents ; les grands gisements

d’emploi (Agriculture, Pêche, Mines, Services…) méritent une meilleure

valorisation, en plus éventuellement d’un nouveau Service national civilomilitaire

qui pourrait être pourvoyeur de dizaines de milliers d’emplois ;

20- Mettre en place des outils incitateurs (fiscaux, allégement de charges

sociales, réduction des impôts sur les bénéfices, accès préférentiel aux

financements bancaires avec des taux d’intérêt bonifiés…) pour mieux

orienter l’investissement privé et accroître son volume vers les zones

d’extrême pauvreté et favoriser la création de richesses et d’emplois ;

21- Mettre en oeuvre un Plan de formation professionnelle au profit des petits

métiers et des travailleurs du secteur informel avant de leur ouvrir l’accès

aux financements publics et privés permettant de mieux structurer leurs

activités, en améliorer la productivité et en accroître les revenus ;

22- Revoir le statut des sociétés d’intermédiaires (telles que le BEMOP) pour

mettre fin à leurs scandaleuses pratiques relevant de l’esclavage moderne de

prélèvement confiscatoire de plus de 60 % sur les salaires des travailleurs

placés ; il convient, soit de les supprimer totalement et en confier la mission

aux syndicats de travailleurs, soit plafonner cette ponction à 10% maximum

conformément aux standards internationaux ;

23- Concevoir et mettre en oeuvre un grand Programme de reconstitution du

cheptel au profit de petits paysans et éleveurs pauvres pour les doter d’un

bétail composé au minimum de 10 à 15 têtes de différentes familles (Ovins,

caprins, bovins, camelins) selon les zones d’élevage et le choix des

bénéficiaires. Ceci favorisera un élevage productif, susceptible d’accroître

les revenus des haratines hors des villes et en réduire la misère;

24- Promouvoir une politique de logement social pour assurer l’accès des

pauvres à la propriété et à un logement décent doté de l’eau et de

l’électricité, avec une priorité aux demandeurs haratines;

25- Appuyer les Organisations de la société civile engagées dans le combat

pour l’égalité réelle, l’appui à la création d’Instituts de réflexions

stratégiques et de prospectives, d’Observatoires dédiés à développer la

recherche, les études et les publications sur la problématique Haratine.

26- Favoriser l’accès aux médias de tous les courants de pensée, des hommes

politiques, intellectuels et militants de la cause de l’émancipation pour

contrebalancer la pensée unique du courant nationaliste conservateur et

négationniste qui refuse tout débat sur la réalité de l’esclavage et de

l’exclusion dans le but de pérenniser l’ordre social injuste et inégalitaire au

péril de l’unité et de la cohésion nationales.

27- Faire de la journée correspondant à la date du vote de la Loi criminalisant

les pratiques esclavagistes une Journée officielle de souvenir et de mémoire

où la Nation rend hommage aux victimes de l’esclavage et célèbre par la

production intellectuelle la plus variée les valeurs d’égalité, d’antiracisme,

de solidarité et de fraternité. Il importe d’organiser à cette occasion des

cérémonies ponctuées de discours officiels, des débats dans les médias, les

écoles et universités ; des remises de décorations et de reconnaissances aux

militants de cette noble cause ;

28- Créer une Haute Autorité indépendante, inscrite dans la Constitution, en

charge de la promotion de l’égalité réelle et de la lutte contre les

discriminations et l’exclusion , dotée de pouvoirs d’investigation,

d’interpellation et du droit d’ester en justice pour assister les personnes

victimes de discrimination, de racisme ou d’esclavage.

Cette Haute Autorité pourrait également saisir le Gouvernement et les

Autorités publiques de tout manquement aux principes d’égalité et de

traitement équitable des citoyens, quelles qu’en soient les causes.

Elle devrait établir un rapport annuel soumis au Président de la République et

aux Présidents du Sénat, de l’Assemblée nationale ainsi qu’au chef de file de

l’opposition démocratique.

Ce rapport sera rendu public et alimentera un débat au niveau des deux

chambres du parlement.

Partant du constat de cette sombre réalité, le présent Mémorandum

constitue un appel à la refondation d’un nouveau projet politique national, tout

entier tourné vers l’émancipation réelle de tous les marginalisés, à commencer

par la communauté Haratine et l’éradication totale de toutes les formes

d’injustice, d’exclusion et de domination dont souffrent tous nos concitoyens.

Plus particulièrement, la présente initiative a pour ambition de traduire

une nouvelle prise de conscience de la communauté Haratine pour capitaliser les

acquis des luttes menées depuis la création du Mouvement El Hor en mars 1978,

tirer les leçons de ces combats et concevoir un nouveau projet à la fois

fédérateur et en rupture franche avec le système des hégémonies tribales.

Le grand mouvement civique que ce Mémorandum voudrait susciter et

animer, s’inscrirait à contresens de l’ordre ancien, esclavagiste et féodal, pour

créer les conditions d’une révolution sociale et politique portée par une forte

mobilisation citoyenne, pacifique et démocratique, associant toutes les forces,

issues de toutes nos communautés nationales et transcendant les appartenances

partisanes de culture, d’opinion ou de couleur.

Ce document est une invitation pressante à s’adapter à la situation

nouvelle et aux exigences de la réalité pour réaliser un apaisement entre les

centres de pouvoir et la société et prévenir ainsi les effets délétères de

l’insondable montée des frustrations qui s’accumulent jour après jour.

Il interpelle les forces politiques nationales (majorité présidentielle et

opposition démocratique), les acteurs de la société civile, les leaders d’opinion

ainsi que tout patriote mauritanien sincère pour leur demander, à tous, de se

prononcer sur le contenu de ce modeste document.

En définitive, l’objectif premier d’une telle démarche n’est autre que de

consolider la justice sociale, de consacrer l’égalité citoyenne et d’assurer l’unité

nationale sur des bases saines, solides, viables et durables.

 

DISPOSITIONS FINALES

· LES PROMOTEURS DE CE MEMORANDUM SONT DES CADRES

HARATINES APPARTENANT AUX DIFFERENTS PARTIS

POLITIQUES DE LA MAJORITE ET DE L’OPPOSITION AINSI

QU’AUX ORGANISATIONS DE LA SOCIETE CIVILE.

· TOUTES LES PERSONNES PHYSIQUES OU MORALES QUI

ADHERENT A CE PROGRAMME PEUVENT SE JOINDRE AUX

INITIATEURS DE CE MEMORANDUM ET SIGNER UNE PETITION

EN VUE DE LE PROMOUVOIR.

· A COURT TERME, CE MANIFESTE DEVRAIT SERVIR POUR LA

SENSIBILISATION, LE PLAIDOYER ET LA MOBILSATION POUR

LA GRANDE MARCHE NATIONALE ET PACIFIQUE DITE

MARCHE POUR LA JUSTICE ET L’EGALITE CITOYENNES.

· SUR LE MOYEN TERME, CE MANIFESTE DEVRAIT ETRE

DEBATTU, ENRICHI ET VALIDE PAR LE PLUS GRAND NOMBRE

DE CADRES, DE GROUPES ET D’ENTITES Y ADHERANT POUR

QU’IL ACQUIERE LA FORCE ET LA LEGITIMITE NECSSAIRES

POUR DEVENIR UN DOCUMENT DE BASE, SUSCEPTIBLE

D’ETRE LE POINT D’ANCRAGE POUR L’OUVERTURE D’UNE

NOUVELLE ERE POUR LA MAURITANIE

· IL CONVIENT, PAR LA SUITE, DE LUI DONNER LE MAXIMUM

DE RESONNANCE AU NIVEAU DE LA SOCIETE CIVILE, DE LA

CLASSE POLITIQUE, DU GOUVERNEMENT ET DES

CHANCELLERIES ETRANGERES.

· CE MANIFESTE SERA RENDU PUBLIC A L’OCCASION DE CETTE

GRANDE MARCHE, ENRICHI D’UNE DECLARATION POLITIQUE

ET LARGEMENT DISTRIBUE EN MAURITANIE ET AU NIVEAU

ARABE, AFRICAIN, EUROPEEN, AMERICAIN ET

INTERNATIONAL.

· L’ACTION POUR L’EMANCIPATION DES HARATINES SERA

FEDEREE AVEC L’ENSEMBLE DES EFFORTS ET DES LUTTES

DESTINEES A DEFFENDRE LES DROITS DE L’HOMME ET A

ENRACINER LA DEMOCRATIE, LA JUSTICE SOCIALE ET LA

BONNE GOUVERNANCE AU PROFIT DE TOUS LES CITOYENS

DE TOUTES LES COUCHES SOCIALES ET DE TOUS LES CITOYENS DE LA NATION.

Octobre 2012



 

 

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